ANNEXE 22
UNE
MISSION APOLLO
COMME SI VOUS ETIEZ
Le lanceur Saturn 5 est constitué de millions de pièces construites par des milliers de société à travers les Etats Unis. Tous ces éléments forment le premier, le second et le troisième étage d' un véhicule de près de 110 m de haut avec le vaisseau Apollo. La société Boeing est le maître d' oeuvre industriel du programme, le centre Marshall est responsable du lanceur, le centre Johnson du vaisseau et le centre Kennedy des opérations finale de montage et de lancement. Six firmes principales se partagent la réalisation du Saturn 5, Boeing pour le premier étage S1C intégré à Michoud près de la Nouvelle Orléans, North American pour le second S2 intégré à Seal Beach Californie, Mc Donnel Douglas pour le troisième S4B assemblé à Huntington Beach Californie aussi. IBM réalise le cerveau électronique à Huntsville, Rocketdyne les moteurs à Conaga Park, North American rockwell les modules CSM à Downey et Grumman le LM à New York. Le transport des éléments constituant Saturn 5 arrivent des quatre coins des USA par divers moyens de transport. Les plus gros éléments, le S1C et le S2 arrivent au KSC par péniches. Le S1c part de Michoud au centre de tests du Mississipi puis retourne à Michoud et gagne enfin la Floride par le Golfe du Mexique. Le S2 passe par le canal de panama pour aller au centre du Mississipi, puis contourne la Floride pour rallier le KSC. Le S4B, plus "petit" est transporté par avions géant de Aero Spacelines, les Super Guppy. ils assurent aussi le transport de l' anneau IU, les modules Apollo, CM, SM et LM. Les moteurs sont transportés par camions après avoir été transporté dans les premiers temps par avion. Le matériel transporté par route, air et mer et rail entre les différents centres atteint 250 000 tonnes par an. Près de un millions de km sont franchis annuellement par les avions de transport utilisés dans le programme dont plus de 700 000 par les Guppy et 200 000 par les avions mis à la disposition de la NASA par le DoD. 240 000 km sont franchis par voies maritimes et fluviales. Chaque module est testé par son constructeur avant livraison au KSC et il y passe encore 6 mois de contrôle avant d' être assemblé et mis sur le lanceur. Les étages sont aussi testé avant leur acheminement en Floride, à Sacramento Californie pour le S4B et au Mississipi pour les étages S1C et S2. L' assemblage de tous ces éléments est réalisé en Floride dans un gigantesque bâtiment le VAB. Le montage en lui même des étages ne dure que quelques jours, les contrôles et les tests eux durent plusieurs semaines à l' intérieur du bâtiment. Le vaisseau Apollo complet monté, le Saturn 5 est amené sur le pad à 5 km de là attaché à sa tour ombilicale sur une gigantesque plateforme, elle même transportée par un engin à chenille, le Crawler Transporter. Sur le pad, le lanceur est "brancher" électriquement, pneumatiquement avec les installations du sol (Overall test, Plug In). Une structure mobile de service vient ensuite "englobée" l' ensemble pour les derniers contrôles et préparatifs avant le compte à rebours. La revue d' aptitude au vol Flight Readiness Test est le dernier pas vers avant la démonstration du compte à rebours CDDT (CCountDown Demonstration Test). Les équipages principaux et de réserves participent à cette FRT. Après le remplissage en ergols hypergoliques et en RP1 commence le CDDT. Il est divisé en deux parties, la partie "humide" wet et la partie "sèche" dry. La partie wet est réalisée en premier, et comprend le compte à rebours en entier, avec chargement des propergols, jusqu' à T-8,9 secondes. Les équipages ne participent pas à ce CDDT wet. Quand il est terminé, le propergol est vidangé des étages du lanceur et la dernière partie du décompte est remis en route, en simulant le remplissage avec cette fois l' équipage principal comme il le fera le jour J. Contrairement aux programme Mercury et Gemini, Apollo est géré par l' informatique vue la complexité du lanceur. Des computeur RCA IIOA sont ainsi utilisé pour les séquences automatiques et les vérifications du VAB au décollage. D' autres computers similaire (ACE Acceptance Checkout equipment) mais séparé sont utilisés pour le vaisseaux Apollo depuis des salles dans le MSOB (dans la zone industrielledu Cape). Le compte à rebours final est géré par 450 personnes au KSC installées dans les "Firing room" du centre de lancement LCC à 5 km du pad, attenant au VAB. Mais ce sont plus de 5000 personnes qui supervisent l' ensemble des opérations depuis l' arrivée des éléments, étages et vaisseaux jusqu' au lancement. Il dure 28 heures avec 6 heures de pause à T- 9 H pour des travaux éventuels. Il est précédé d' un pré compte qui commence 5 jours avant le lancement pour la préparation des modules CM, SM et LM, l' activation des piles à combustibles et le remplissage en hélium de l' étage de descente du LM. Le CD débute après une pause de 5 heures. Voici ci dessous le compte à rebours pour la mission Apollo 11. Il existe quelques variantes pour les autres missions avec notamment les activités de l' équipage.
100 wagons assurent le remplissage des réservoirs du Saturn 5 (3650000 litres, soit pour un automobiliste 700 fois le tour de la terre). 95 moteurs composent le lanceur, du F1 de 700 tonnes de poussée au moteurs SE8 de 45 kg de poussée du module de commande. L' ensemble de ces moteurs développent 300 millions d'e CV dont 160 pour le premier étage. Elle est suffisante pour envoyer la totalité des vaisseaux pilotés lancés depuis 1961. n fait,
Two... One... Zero... Ignition! ... We have ignition!... Lift-off!... We have lift-off!.. A moins de 5 kilomètres, il faut porter des lunettes de soleil et bien se boucher les oreilles pour ne pas devenir aveugle ou sourd! Le vaisseau Apollo et ses trois passagers ne sont que bien peu de chose au sommet de cet engin de 112 mètres de haut, pesant 2 750 tonnes. T+ 00: 01:21,0 Saturn 5 passe la zone de pression dynamique maximale à 13183 m d' altitude. T+ 00:02:15, le premier étage Boeing S-1C termine son travail après avoir brûlé 13 000 litres à la seconde... A chaque seconde, la fusée s'allège d'environ 13 tonnes, la masse d'une vingtaine de voitures européennes... Mais c'est la consommation minimale pour assurer au " monstre " une puissance équivalente à celle d'une file de grosses voitures américaines, pare-chocs contre pare-chocs entre New York et Los Angeles... L' altitude est alors de 44,26 km, la vitesse de 1977 m-s et la distance du pad de 46 km. T + 00:02:42, le S-IC se détache et tombe en mer, tandis que le deuxième étage North American S-Il commence à jouer son rôle, sous l'impulsion de ses cinq moteurs Rocketdyne J-2 de 100 tonnes de poussée. Avec le deuxième étage S-Il intervient la phase de croisière. Le S-IC a donné l'accélération initiale. Il s'agit maintenant de continuer sur la lancée et de gagner, un par un, les kilomètres/secondes qui permettront la satellisation autour de la Terre. Cette phase du vol est pourtant délicate: le S-Il, avec ses 10 mètres de diamètre et 25 mètres de haut, chargé de 420 000 kilos d'hydrogène et d'oxygène liquides, constitue une bombe aussi puissante qu'un engin atomique... T+ 00:03:17,2, les
couches denses de l'atmosphère étant désormais franchies, la tour de
sauvetage et la protection thermique du module de commande CM
peuvent être éjectées. C'est autant de poids mort que la fusée devra
accélérer. En cas d'accident, les astronautes pourraient encore redescendre sur
Terre à bord de leur vaisseau comme lors d'une rentrée atmosphérique
classique. T+ 00:07:39, le moteur central du S2 s' éteint. T + 00:09:11, les quatre autres moteurs du S2
s' éteignent à leur tour. L' altitude est de 185 km, la vitesse de 6915 m-s T+ 00:09:15, le troisième et dernier étage S4B prend le relais. La première vitesse cosmique, celle qui permet la satellisation autour de notre globe, est presque atteinte. Il suffit d'une " petite " impulsion du moteur Rocketdyne J-2 - le temps de brûler 37 tonnes d'hydrogène et d'oxygène!... - pour injecter sur orbite terrestre basse le vaisseau Apollo dont le S-IVB et sa réserve de propergols restent solidaires. T + 00:11:40, le moteur J2 s' arrête. T+ 00:11:50, le vaisseau Apollo de 140 tonnes (5% de la masse du départ) est placé sur orbite de parking à 187 km d' altitude. La fusée est alors à 2711 km du pad.
Pendant une heure et demie ou trois heures (une ou deux révolutions), c'est l'attente... Mais pas une simple attente inactive, loin de là: Les techniciens au sol déterminent les caractéristiques exactes de l'orbite de parking, afin de confier rapidement aux ordinateurs le calcul du point précis où il faudra mettre à nouveau en marche le moteur du troisième étage S4B pour que le vaisseau s'élance vers la Lune... dans la bonne direction. A bord, les trois astronautes n'ont toujours pas droit au repos: Il faut vérifier une " check-list " de 200 pages. Pas question de chômer... Pas question non plus de partir pour une semaine de voyage intersidéral sans être certain que tout marche bien. T+ 02:44:14, le grand moment arrive enfin, le moteur J-2 est remis en marche. En cinq minutes, il permet de passer de la première vitesse cosmique, 28 000 kilomètres/heure, à la seconde vitesse cosmique, 41 000 kilomètres/heure, celle qui permet d'échapper à l'attraction terrestre... T+ 02:50:00, le train spatial est en route
vers la lune TLI, Trans Lunar Injection sur une orbite de retour naturel de 111
km de périgée. Désormais, les astronautes ne peuvent plus compter que
sur eux et sur leur vaisseau. Ils s'éloignent rapidement de la Terre. Radio et
télévision sont les seuls liens avec notre globe. Que le moteur du module de
service, le " SPS ", ne fonctionne pas et ils risquent de s 'écraser
sur la Lune ou, 7 jours après, sur la Terre... T+ 03:20:00, le
CSM (l'ensemble formé par le module de commande " CM " et le module de
service " SM ") est séparé du 3eme étage S4B au sommet duquel est
fixé le module lunaire LM. Ce dernier est logé dans un carénage en quatre
sections qui s'ouvrent à la manière de pétales pour permettre l'accès au LM et donner aux astronautes un repère pour le pilotage. Le CM
fait un demi-tour sur lui-même et se rapproche progressivement du LM. Pour ces
manoeuvres, les pilotes agissent sur les groupes de petites
fusées de contrôle d'altitude du SM, 16 au total. Amarrage, le sas
du CM est venu se fixer sur le sas supérieur du module lunaire LM. L'opération
est en tous points semblable à l'arrimage d'une cabine Gemini et d'un étage
Agena, exploit réussi à de nombreuses reprises en 1966. Les conditions,
toutefois, sont différentes. Car si le rendez-vous des Gemini et des Agena
s'effectuait sur orbite terrestre, il s'agit désormais d'un arrimage sur
trajectoire translunaire, les véhicules s'éloignant de notre planète mille
fois plus vite qu'un coureur cycliste. Certes, le CSM et l'étage S4B sur lequel est fixé le
LM se déplacent à la même vitesse
- leurs vitesses relatives sont donc nulles - mais l'opération n'en est pas
moins délicate. Les astronautes ne doivent compter que sur leur adresse. T+ 04:10:00, les astronautes extraient le LM et abandonnent le S4B à lui-même. Pour plus de sécurité, les moteurs auxiliaires de l'étage seront remis en marche afin de l'éloigner du vaisseau. Désormais, il ne reste plus que 45 des 2 850 tonnes de l'engin au départ! La fusée Saturn 5 a définitivement joué son rôle et les trois modules du vaisseau Apollo, qui ne représentent guère que 1,5 % de la masse totale au lancement, foncent vers notre satellite naturel. L'attraction terrestre agit toujours sur le vaisseau et le freine quelque peu, mais l'élan est suffisant pour qu'il ne revienne pas sur ses pas avant d'avoir pénétré dans le secteur lunaire. L'orbite translunaire choisie demeure une orbite terrestre, mais à très grande apogée, c'est dire que le vaisseau, s'il continuait sur sa lancée, irait au-delà de la Lune puis reviendrait automatiquement vers la Terre. Sur le trajet lunaire, plusieurs corrections de trajectoire seront utiles. Ce sont les lois de la mécanique célecte, les heures de lancement qui les définis. Pour ces manoeuvres, les astronautes mettent à feu le SPS, le moteur du module de service, dans la direction que leur indique le calculateur de bord et que confirment les ordinateurs terrestres. entre ces correctionss, l' équipage goûte un repos bien mérité avant d'avoir à commander ultérieurement si besoin d' autres corrections de trajectoire. Cette période de croisière, pendant 70 heures environ soit deux jours et demi, n'est pas la plus passionnante de la mission, mais les astronautes n'y peuvent rien: on peut modifier un vaisseau ou une fusée, mais pas raccourcir la distance Terre-Lune... Le temps passe vite, toutefois, entre les repas, les périodes de repos, celles d'exercice et les innombrables mais indispensables contrôles. Il y a tant de choses à vérifier pour s'assurer que le vaisseau fonctionne normalement et, surtout, fonctionnera bien jusqu'au retour. Les astronautes doivent naviguer afin de déterminer la position précise de leur vaisseau. Pour cela, ils disposent d'un sextant. Les instruments sont améliorés, mais le principe est le même que du temps de Christophe Colomb... La Lune grandit régulièrement derrière les hublots. La trajectoire est correcte. T+ 70:00:00 (78:00:00 pour Apollo 15), les astronautes font pivoter le vaisseau et déclenchent la mise à feu du moteur du SM pour se transférer de l'orbite translunaire sur une orbite circumlunaire LOI Lunar Orbit Insertion (" sélénoexcentrique "). La direction du rétro-freinage et sa durée doivent être extrêmement précises afin que l'orbite soit convenable. C'est une question de centièmes de degré, de centièmes de seconde. Si la direction du rétro-freinage n'était pas correcte, le vaisseau s'éloignerait ou se rapprocherait dangereusement de la Lune. Certes, une nouvelle correction serait possible - le moteur du SM, fournissant 10 tonnes de poussée, peut être remis en marche jusqu'à 50 fois - mais ce serait là une consommation excessive de propergols dont le besoin pourrait se faire sentir lors du retour vers la Terre. Le vaisseau amorce donc sa course sur orbite sélène. Il s'agit maintenant de vérifier à nouveau tous les équipements, et en particulier ceux du module lunaire, avant de se lancer dans la grande aventure. Si l'un ou l'autre des systèmes de bord ne fonctionnait pas, il serait toujours temps de remettre à feu le moteur SPS pour revenir sur Terre. La vie de trois hommes est en jeu. Il n'est donc pas question de prendre de risques inutiles. Si tout va bien, et seulement si tout va parfaitement bien, deux des astronautes passent du CM dans le LM par le sas commun. Les deux hommes retenus pour la délicate mission sont le commandant de bord et le pilote du LM. Continuant à tourner autour de la Lune à bord du CSM, le pilote sera leur seul lien avec la Terre et attendra patiemment leur retour pour les ramener à nous. Il ne vivra pas une expérience aussi excitante que celle des deux autres, mais il n'en aura pas moins un rôle primordial à jouer tout en observant scientifiquement la surface du notre satellite naturel et l'immensité de l'univers. Survolant le LM toutes les deux heures environ, le pilote du " CM " devrait pouvoir observer ses compagnons. Le commandant de bord et le pilote du LM ayant
vérifié que tout marchait bien, ils se séparent du CSM à T + 100 heures
après le lancement. La grande aventure
commence vraiment!... T + 101 heures, les deux astronautes se placent sur une orbite de transfert qui les rapproche rapidement du sol lunaire.
Le LM, pendant une petite heure, se rapproche toujours plus de la Lune. De plus en plus vite. A l'aide de petites fusées de pilotage, les astronautes contrôlent l'attitude de leur engin. Ils lui donnent la position idéale pour la remise en marche du moteur de descente. Cette fois, il ne s'agit plus d'un simple changement d'orbite, mais bien du grand coup de frein final, à T + 102 heure. Le LM est pratiquement parallèle à la surface et les astronautes ne voient que les millions d'étoiles et, loin, très loin, la Terre. Après huit longues minutes, le pilote redresse doucement le LM. Il n'est plus alors qu'à quelques centaines de mètres du sol.
Il faut maintenant, dans la zone choisie pour l'alunissage d'après les photos des Lunar Orbiter, déterminer un point précis au milieu de tous ces cratères et de tous ces rochers. La vitesse du LM est désormais pratiquement nulle et une simple action sur la commande du moteur à poussée variable pourrait l'immobiliser sur place. Ou le renvoyer vers le CSM si quelque chose à bord ne fonctionnait pas normalement! Mais tout se passe normalement. Les astronautes repèrent un terrain relativement plat, au fond d'un petit cratère. Ils réduisent la poussée du moteur, s'immobilisent à quelques mètres du lurain en redonnant un peu de gaz, à la manière d'un hélicoptère dans l'atmosphère terrestre. Ils réduisent encore un peu la poussée, s'immobilisent un court instant à quelques dizaines de centimètres et se laissent choir en douceur... T+ 103 heure, les quatre pieds du LM s'enfoncent dans le sol et se stabilise immédiatement. Le premier souci n'est pas de regarder les environs: Il faut s'assurer que rien à bord n'a souffert de l'impact. Les techniciens de la Terre vont être rassurés sur le bon fonctionnement des équipements avant de demander quel aspect a la Lune vue.., de la Lune. La durée du séjour lunaire peut varier de 21 h 36 pour Apollo 11 à près de 75 heure pour Apollo 17. Il leur faut ensuite rentrer à bord, en empruntant comme pour la descente la petite échelle disposée en face du sas frontal, pour faire le plein d'énergie et d'oxygène. Pour se reposer, aussi... car le travail et même la simple marche, dans ces conditions de pesanteur réduite, sont extrêmement fatigants. Mais même les meilleures choses ont une fin, et il faut penser au retour après cette journée et demie passée sur ce gros rocher de 3 500 kilomètres de diamètre qui tourne à 380 000 kilomètres de la Terre. C'est une phase délicate, puisqu'il faut aller réaliser un rendez-vous avec le CSM sur orbite lunaire sans avoir pour cela les fantastiques installations de Merritt Island ni tous les radars qui, sur Terre, peuvent permettre un rendez-vous spatial pour une consommation minime de propergols. L'étage de descente du LM sert de rampe de lancement pour l'étage de remontée. La petite fusée mono-étage qu'est la partie supérieure du LM s'élève doucement et prend de la vitesse sous l'impulsion du moteur de 1 600 kilogrammes de poussée. Elle s'incline et se place sur l'orbite de transfert qui l'amènera à proximité du CSM. Insensiblement, sans qu'il n'y ait rien à faire que donner si besoin la petite impulsion qui corrigera l'orbite, le LM se rapproche du CSM. Une demi-heure s'écoule. La phase finale du rendez-vous commence trois heures après le départ de la lune toujours avec l'aide du radar et de la calculatrice de bord. Ils disent dans quelle direction et pour quelle durée donner les toutes petites impulsions qui amèneront l'engin à quelques dizaines de mètres seulement du vaisseau-mère. Ensuite, ce ne sera plus qu'affaire d'appréciation. Les pilotes amèneront leurs deux vaisseaux en regard l'un de l'autre, à l'aide des petits jets de contrôle, comme ils l'ont fait plus tôt dans la mission, comme ils l'ont fait des dizaines de fois en simulateur sur la Terre. L'arrimage se fait trois et demi après le départ de la lune (2 heures pour Apollo 15), non sans quelques difficultés d'alignement... Car les pilotes du " LM ", toujours sanglés, ne peuvent voir le " CSM " qu'au travers de petits hublots juste à leur verticale. C'est au pilote de ce dernier de faire l'essentiel du travail. Le verrouillage ayant été vérifié, la pression étant la même dans les deux habitacles, le sas peut être ouvert. C'est la joie des retrouvailles sur orbite lunaire, encore qu'il n'y ait guère de temps à perdre: il y a encore beaucoup de choses à faire avant de prendre le chemin du retour! Et dans l'Espace, on se fatigue vite... Il faut également se reposer souvent. Les astronautes coupent tous les circuits du LM et font passer dans le CM les échantillons du sol lunaire qu'ils ont recueillis tant en surface qu'à faible profondeur. Désormais, l'étage de remontée n'est plus qu'un poids mort. Il est largué 4 heures après le RV. Une petite action des fusées de contrôle permet d'éloigner le CSM à une distance respectable qui ira en s'accroissant à la suite de ce léger changement d'orbite. Il faut attendre maintenant le moment idéal pour s'élancer vers la Terre. Trois heures s'écoulent, qui seront mises à profit par les trois héros pour contrôler à nouveau tous les ensembles et équipements du vaisseau et vérifier sa position. Il s'agit de viser juste, une fois encore. Les réserves de propergols sont suffisantes, mais elles ne sont pas énormes au point de pouvoir se permettre toutes les fantaisies. Au moment précis, soit entre 3 heures 30 et presque une journée pour les missions J (Apollo 15,16 et 17), le moteur SPS est mis à feu. Apollo repart vers la terre. Le retour du vaisseau vers la Terre est pour les astronautes la seule partie un peu " ennuyeuse " de la mission. C'est pourquoi ils ont été autorisés, malgré le coût extraordinaire de chaque gramme envoyé vers la Lune, à emporter quelques kilos de matériel récréatif. Comme à l' aller, quelques corrections de trajectoire sont réalisées pour ajuster le vaisseau dans le corridor de rentrée. La Terre est toute proche maintenant, les corrections de trajectoire ont permis au vaisseau d'entrer dan l'étroit couloir théorique, de part ou d'autre de la trajectoire idéale Quelques dizaines de kilomètres plus haut seulement et le vaisseau repartait pour le lointain espace après n'avoir que frôlé la Terre... Quelque dizaines de kilomètres plus bas et il se consumait en rentrant trop brutalement dans l'atmosphère terrestre... Cette fois, les réservoirs du SM sont vides ou presque... Contraire ment aux Mercury et Gemini, Apollo n'a pas de rétro-fusée. Et c'est pour cette raison que le vaisseau doit être conduit avec précision dans le " corridor spatial " qui l'amènera à se freiner dans l'atmosphère Le SM n'est plus d'aucune utilité. Les provisions du CM en énergie et en oxygène seront largement suffisantes pour la dernière demi-heure Le SM est donc largué et abandonné à son sort et se consumera dans les couches denses de l'atmosphère. Pour les trois astronautes, une partie difficile reste à jouer. La rentré dans l'atmosphère est tout aussi délicate que l'alunissage, tout aussi délicate que les rendez-vous... Sans rétro-fusée, fonçant vers la Terre à plus de 40 000 kilomètres/heure, le vaisseau doit arriver tangentiellement afin de pénétrer obliquement, progressivement, dans les couches supérieures de l'atmosphère. Il faut surtout qu'il ait l'inclinaison idéale pour que cette entrée soit progressive, les astronautes étant dans la meilleure position pour " encaisser " la décélération et le vaisseau étant recouvert d'un matériau ablatif de protection thermique inégalement réparti. Cette inclinaison idéale est maintenue au début de l'entrée dans l'atmosphère grâce aux 16 petites fusées de stabilisation dont est doté le module de commande. Par la suite, la configuration aérodynamique du vaisseau lui permettra de se maintenir en position de façon quasi automatique. Les parois du " CM " commencent a s' échauffer et les astronautes ressentent un début de freinage. Des flammes commencent à lécher la cabine dont les parois sont portées à quelque 2 500 0C. Le matériau ablatif dont elle est recouverte se désagrège et se détache, régulièrement et uniformément, évacuant ainsi la majeure partie de la chaleur. IL n'y a rien là que de très normal. Toutefois, la température se maintient à 21 0C à l'intérieur du vaisseau. Les astronautes ont la sensation désagréable et réelle de peser six à sept fois leur poids après n'avoir pesé qu' un sixième de ce poids sur la Lune et absolument rien pendant les 4/5eme du voyage... L'incidence de la cabine est telle qu'elle ricoche littéralement sur les couches denses de l'atmosphère: descendue à 60 kilomètres seulement de la surface, elle rebondit jusqu'à 85 kilomètres où elle se refroidit un peu avant la rentrée finale. Mais la vitesse est largement réduite désormais et elle continue a s amenuiser tandis que vont pouvoir reprendre les communications radio. A 7 500 mètres d'altitude, la protection thermique du compartiment des parachutes est larguée. Deux parachutes stabilisateurs sont extraits 2 secondes plus tard. Les deux parachutes stabilisateurs ralentissent encore la cabine et l'amènent à une nouvelle orientation proche de la verticale. Toute l'opération, bien qu'elle puisse être commandée si besoin par l'un des astronautes, est entièrement automatique grâce à un programmateur qui déclenche les différentes séquences en fonction de l'altitude. A 3 500 mètres, trois petits parachutes sont déployés et extraient de leurs logements les trois parachutes principaux de 25 mètres de diamètre. Ces derniers ne sont tout d'abord que partiellement déployés, assurant ainsi une décélération qui ne soit pas trop brutale pour les astronautes. Six secondes plus tard, les câbles de retenue sont sectionnés automatiquement et les voilures principales se gonflent totalement. Si l'un des trois parachutes du vaisseau Apollo ne s'extrayait pas ou se mettait en torche, les deux autres suffiraient pour récupérer les astronautes sains et saufs sans que l'impact à la surface de l'Océan soit trop brutal. Se balançant très doucement au bout des suspentes, au gré de la brise marine, Apollo et ses trois passagers descendent vers l'Océan qu'ils toucheront 13 minutes après la rentrée dans l' atmosphère. Le porte-avions de récupération le plus proche a immédiatement dépêché des hélicoptères d'où des para-plongeurs ont sauté pour fixer au vaisseau des bouées de flottaison et... répandre de la poudre anti-requins! Dans quelques minutes seulement, Apollo, son équipage et sa précieuse cargaison seront à bord du bâtiment. Des 2 750 tonnes de Saturn V au départ, il reste moins de trois tonnes.., un millième seulement... C'est le prix de la Lune: Elle exige 999 pour 1000 de ce que vous lui envoyez!
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