LES INCIDENTS DU PROGRAMME SHUTTLE
Le 28 janvier 1986, l' Orbiter 099 Challenger, second
véhicule réutilisable de la NASA explose en plein vol 75 secondes après s'
être élancé du pad 39 B du centre spatial Kennedy. Le programme de système de transport spatial
réutilisable STS est lancé par une décision politique, à un moment ou les
Américains délaissent la lune et se demandent si cela valait vraiment le coup.
La mission Apollo 13 l' année d' avant est encore dans toutes les
mémoires. En ce début de décennie, ou la guerre du Vietnam s'
enlise et les problèmes sociaux font rage, Il est vrai que le budget alloué au programme de navette spatiale, le Space Shuttle ne vaut pas celui du programme lunaire Apollo. L' enjeu n' est pas le même, il faut faire avec. Et les Américains ont fait avec. Oublions les éternels retards dans le développement
du projet, le problème avec les moteurs principaux SSME, les tuiles thermiques
qui se décollent sans cesse, l' espoir perdu de sauver la station Skylab pour
arriver au 1er janvier 1981. UNE ENERGIE CONSIDERABLE Le premier vol STS 1 en avril n' est pas sans problèmes. Outre le décollement de quelques tuiles thermiques sur les carénages OMS de Columbia, le problème le plus grave s' est produit au lancement. La puissances des moteurs du Shuttle est en effet gigantesque, elle représente quelques 85 millions de kW. Une fraction de cet énergie pousse le véhicule vers le haut, une autre est dissipée par le jet gazeux, une autre se manifeste sous forme de vibrations avec propagation des sons dans les solides, enfin une dernière fait naître des vibrations acoustiques qui se transmettent dans les fluides et dont une partie peut revenir vers le véhicule et faire vibrer certaines de ses pièces si des phénomènes de résonance se développent. Si l' on estime à 0,1 % seulement le pourcentage de la puissance que capte le véhicule sous forme acoustique directe ou indirecte, on aboutit à la valeur de 8500 kW non négligeable. Et cela suffit pour tordre, casser, fondre des masses importantes. L' idéal est de laisser sous le lanceur une hauteur
suffisante pour qu' il n' y ait pas ce phénomène de rebond, soit un peu plus
que la hauteur totale du lanceur. C' est ce que font les soviétiques, parce qu'
il ont la place pour le faire. Aux Etats Unis, en Floride, le centre Kennedy est
à quelques centaines de mètres de l' océan, l' espace sous les lanceurs est
faible. Dans le cas du Shuttle, il n' y a qu' une quinzaine de mètres entre le
sol et la base du Shuttle, d' ou une énorme interaction avec le lanceur. Le
Shuttle est moins puissant que Saturn 5 qui utilisait la même plateforme. Le
rapport de puissance/ masse est plus important et en outre le matériel délicat
est sur le Shuttle près de la plateforme alors qu' il était logé tout en haut
dans la tête sur Saturn 5. Apparemment ce système n' a pas donné entière satisfaction lors du départ de Columbia, des pièces ont été tordu et certaines parties du lanceur ont été soumises à des charges beaucoup plus importantes que prévues. Pour le second vol, le système est amélioré. Les techniciens installent dans la fosse des moteurs à poudre SRB tout un système de canalisation destiné à arroser le jet de flammes des boosters à l' allumage. De plus, des sacs d' eau sont installés dans ces même fosses, constituant au moment de leur crevaison par les boosters un énorme matelas d' eau devant réduire le niveau acoustique. Ainsi lors du décollage de Columbia STS 2 en novembre 1981, le niveau sonore a baissé de moitié. A l' issue du vol, les ingénieurs s' inquiètent
des vibrations provoquées par la combustion des boosters. Ces vibrations se
font sentir jusque dans la cabine. La NASA sollicite l' expertise de Gary Flandro,
professeur d' aérotechnologie à l' institut de technologie de georgie. Il
conclut que ces vibrations témoignent d' instabilités de combustion
provoquées par la segmentation des boosters. Il juge le phénomène dangereux
et si les oscillations dépassent un certain seuil, des contraintes excessives
peuvent malmenées le combustible non encore brûlé et provoquer des fissures,
donc entraîner un risque de fuite de gaz enflammés. 1982, c' est avec Challenger que les ennuis arrivent. Avant son premier vol, STS 6 on détecte sur l' Orbiter dans le compartiment moteur une fuite d' hydrogène le 18 décembre. l' enquête montrera qu' une telle fuite aurait pu provoquer l' explosion de la navette. 1983, octobre, à l' issue du vol STS 8,
on constate qu' après le lancement de Challenger, les boosters ont vu leur
tuyère complètement transpercées par les gaz de combustion. il s' en ait
fallu de peu ! 1984, le 26 juin, le compte à rebours est arrêté in-extrémis quatre secondes avant l' allumage des boosters et le décollage de Discovery en raison d' une panne d' une valve dans le moteur SSME n°1. Un feu se déclare à l' arrière de l' Orbiter de part les vapeurs d' hydrogène, mais il est rapidement éteint par les systèmes de sécurité. Pendant 40 minutes, les astronautes restent à bord de l' Orbiter, le temps de laisser les moteurs refroidir. 1985, le 8 mars, Discovery est dans un OPF
au centre Kennedy en préparation de la mission 51 D. La chute d' un panier métallique
qui déplace les ouvriers autour des différentes parties du véhicule cause un
blessé (double fracture de la jambe) et 200 000 $ de dégâts: la porte gauche
de la soute de Discovery est endommagée. Deux semaines de retard sont à
craindre. Dans son rapport, la NASA établit que la société Lockheed, à qui
est confié les opérations de processing au KSC avait enfreint les consignes de
sécurité. Au moins de mai, les trois principaux responsables de Lockheed au
centre sont remplacés. Pour la mission 51 L, il y a plusieurs
incidents à signaler. Tout d' abord le 8 novembre, lors de l' assemblage dans
le VAB des boosters, le segment avant gauche est malmené par une grue et rendu
inutilisable. Le rapport d' enquête de la NASA conclut que les techniciens
impliqués dans l' opération étaient inexpérimentés, peu motivés et
utilisaient un matériel défectueux. Ce rapport long de 176 pages est
intitulé: "l' équipe manquait de discipline". on y trouve des
phrases comme "l' attitude générale des employés est du style: je m
occupe que de ce que je suis responsable; ce n' est pas mon boulot; je faisais
autre chose quand c' est arrivé".
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