LE PROCESSING DE LA MISSION 51 L
Fallait il ou non lancer Challenger le 28 janvier 1986 ? T' elle est la question posée par la commission d' enquête après l' audition de centaines de personnes. Reprenons les dernières semaines précédents le drame. Challenger atterrit sur la base d' Edwards AFB le 6 novembre à l' issue de la mission Spacelab D1. Le rapatriement de l' Orbiter au KSC prend 5 jours, avec escale à Davis Monthan AFB, Kelley AFB et Eglin AFB, le 747 se pose sur la SLF le 10. Le lendemain, Challenger est rentré dans l' OPF 1 pour la préparation de la mission 51 L. Parallèlement dans la baie n°3 du bâtiment d' assemblage VAB, les techniciens commencent le montage des boosters SRB depuis le 28 octobre pour la mission sur le MLP 2. Dans le bâtiment de stockage des boosters SRB, un segment d' un booster prévu pour le vol est endommagé le 8 novembre par les ouvriers en manipulant une grue. Il sera écarté du lot.
Le 10 décembre, le réservoir 25 est assemblé au stack de propulsion. Le 16 décembre, Challenger quitte l' OPF et se dirige vers le VAB pour être assemblé au réservoir.
22 décembre, rollout de Challenger vers le nouveau pad de tir 39 B du
KSC. Ce pad comme le 39 A a été modifier pour pouvoir lancer le Shuttle.
Les travaux ont commencé dans l' été 1978 et ont été terminés récemment. La NASA n' a pas besoin pour l' instant
d' utiliser les deux pads en même temps,
ils ne seront utilisés qu' en mai prochain pour lancer les sondes Ulysse et Galileo
à 6 jours d' intervalle. Les missions de Columbia 61 C et Challenger 51 L ne sont en fait
qu' une
répétition avec la préparation de deux Shuttle en même temps. Le 39 b sera
à nouveau utilisé pour Columbia en mars prochain afin d' aller observer la
comète de Halley. Intégration du satellite TDRS dans le VPF puis dans la soute de Challenger 1986, le 14 janvier, après 10 semaines de
travail, la NASA fait le point sur challenger pour la revue d' aptitude au vol.
Près de 100 contractants sont présents à cap Canaveral, parmi lesquels
Lockheed, le principal, l' équipe "Abort Sites" pour un éventuel
atterrissage en urgence de l' autre coté de l' atlantique, l' équipe
médicale, l' équipe "charges utiles" et le Johnson Space Center
responsable du programme. Tous donnent leur feu vert pour la préparation du
lancement. 18 janvier, Columbia revient atterrir à Edwards AFB au lieu du KSC après le vol 61 C. Le lancement avait déjà été reporté 5 fois depuis décembre 1985. Ce contretemps est jugé catastrophique pour la NASA, le rendez vous avec la comète de Halley le 6 mars devient quasiment impossible. Challenger occupe le pad 39 B et le 39 A sera occupé pendant un mois par Atlantis en vue de simulation avec l' étage supérieur Centaur G destiné à lancer la sonde Galileo vers jupiter. Le calendrier de 1986 semble bel et bien compromis. Au KSC, les équipes sont fatiguées. Elle doivent s' occuper de deux Orbiter en même temps et challenger leur prend beaucoup de temps. Le 22, le lancement du lendemain est reporté suite à une mauvaise météo sur le site de secours de Casablanca au Maroc, le compte à rebours commencera le 23 pour un lancement le 26 à 9 h 36 locale. Le 25, la revue d' aptitude finale, dite L-1 regroupant le KSC, le JSC et le quartier général de la NASA a lieu. Quelques 12 heures avant le décollage prévu, le lancement est à nouveau repoussé, la météo sur le centre spatial devient très mauvaise (gros nuages et éclairs). Le tir est reporté au dimanche puis au lundi 27. Lundi 27 janvier, le directeur de
lancement Gene Thomas repousse encore une fois le décollage, le réservoir
externe étant rempli et l' équipage à bord de l' Orbiter. Un problème avec
un boulon sur l' écoutille d' accès en est la cause, il est vite résolu.
Suivra une vitesse excessive du vent (54 km h). A 16 h, après avoir discuté avec ses collègues, R Ebeling, ingénieur de chez Tiokhol téléphone à Allan Mc Donald, le principal ingénieur de la firme présent au cap. Il lui fait par de ses inquiétudes. Mc Donald appelle alors R Lund, le vice Pt de Tiokhol qui à la main haute sur les questions d' ingénierie. Une conférence est organisée avec les quatre responsables des quatre centres NASA. Regroupant Tiokhol, le centre Marshall et le KSC, elles débutent à 20 h 45. Chez Tiokhol, on est contre le tir. Mais au centre Marshall, G Hardy, le n°4 du centre se déclare "atterré" par ce point de vue, tandis qu' au KSC, Laurence Mulloy, chef des boosters au centre Marshall s' écrie "Bon dieu, Tiokhol, quand voulez vous que je lance, en avril ?". La mission 51 L est plus que symbolique pour la NASA. L' aire du monsieur tout le monde dans l' espace a peut être sonné, l' institutrice Christa Mc Auliffe va tenter de le prouver. Depuis la navette, elle donnera aux millions de petits collégiens américains un cours en direct de l' espace. Le soir même, le Pt Reagan doit énoncer son discours sur l' état de l' Union suivit d' un direct avec l' équipage. Bref, il faut lancer le 28 janvier. Après deux heures de débat, chacun reste sur ses positions. Joe Kilminster, vice Pt de Tiokhol, demande une interruption de séance et revient un demi heure plus tard avec un nouvel avis. A 23 h 45, il signera le texte donnant l' accord de Tiokhol pour lancer le lendemain. Cet accord est envoyé par fax au KSC, un ingénieur de tiokhol se déclare atterré par la décision de sa société:" s' il arrive quelque chose, j' aimerais pas être à la place de celui qui devra venir expliquer à la commission d' enquête pourquoi il a donné l' autorisation de vol". Dans la nuit du 27 au 28, un vent de glace souffle du N-O. Un vent de 14 km h avec des pointes à 30. La température ambiante est descendue à -4,4°C. Au petit matin, pendant la pause à T moins trois heures une équipe spécialisé, la "Ice team" vient faire fondre la glace sur les structures du pad. A u décollage, les morceau se détachant du réservoir externe pourrait endommager les tuiles de l' Orbiter. La température a légèrement remontée, mais il fait froid ce matin pour le départ de Challenger, 3,3°C selon la NASA. L' équipe "glace" relève -7,2°C sur le booster droit à sa base. Des stalactites se sont formées sur les structures de la tour.
A partir de ce moment, on ne sait plus très bien qui est informé de quoique ce soit. Les relevés de température ne sont pas transmis. Rockwell, le maître d' oeuvre du Shuttle s' inquiète ainsi de cette très basse température. Son responsable, le vice Pt R Glaysher ne "répond plus de rien". il le dit à A Aldrich, un des pontes de la NASA. Mais en vain, 2 heures plus tard le compte à rebours reprend. Deux dernières revues de vol sont faites aboutissant à T moins 9 minutes à la décision du directeur de vol Thomas en accord avec les équipes au sol et les deux pilotes à bord de challenger Richard Scobee et Michael Smith, de lancer Challenger. 11 h 38, Challenger s' envole vers son destin. Les astronautes à bord n' avait aucune idée du problème sur les boosters, ils n' en avait pas été informé !. D' après Sciences & Vie et Science & Avenir
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