LES ZONES DE LANCEMENT
Les Zones de Lancement ZL se décomposent
en deux groupes de 9 gérés par chaque PC de tir. La zone au Nord de la
base de St Christol comprend les silos 1-1 à 1-9 et la zone Sud les
silos 2-1 à 2-9. La zone militaire entourant chaque silo représente un carré de 200 m de côté (les cultures du plateau sont
conservées).
|
|
|
|
Travaux de terrassement
d'un silo et creusement du sol. 5500 m³ de
roches extraites
3500 m³ de béton
250 tonnes d'armature métallique |
|
Seul élément visible de
l'extérieur, le bâtiment de surface technique avec son mirador. Il
abrite essentiellement les
équipements nécessaire aux interventions sur le site. Trois clôtures
entourent la zone, une domaniale limitant l'emprise du terrain militaire,
une clôture intermédiaire donnant l'accès à la zone sensible de la ZL
(système de protection par détection périphérique SPIR) et la clôture
dite "zone rouge" électrifiée commandée par le PCT.
Vue aérienne d'une zone
de lancement et d'un silo ouvert avec le bâtiment de surface au fond.
Plan d'implantation de la ZL 1.2.
Au centre de la zone, une
dalle en béton de 50 m sur 50, épaisse de 9 m renfermant le silo à
missile et les équipements annexes. Le silo réalisé en acier et
béton mesure 30 m de long pour un diamètre externe de 3,5 m. Il se
compose de la tête de massif et du fût dissocié pour
éviter les vibrations parasites. La tête d'un diamètre de 9 m
possède des murs bétonnés épais de 1 m. Deux niveaux à - 6 et - 9 m
permettent d'accéder au missile (baies électronique de liaison avec le
PCT et baies électrique et de conditionnement). Une trappe permet
le raccordement de l'ensemble mobile de contrôle EMC, un véhicule
équipé d'un calculateur pour contrôler le missile et ses
périphériques sans avoir à ouvrir le silo.
Coupe du silo avec le
missile S2
Coupe du silo avec la
missile S3
Les éléments en acier étaient préparés en
usine puis convoyés sur les zones de lancement. Après la mise en place du
ferraillage, la préparation du joint étanche était établit entre les deux
parties du silo : le fût et le massif de tête. 3500 m³ de béton étaient
nécessaires à la construction de chaque zone de lancement. La porte
principale, pré-assemblée dans les ateliers de Tamaris d'Alès, était ensuite
livrée sur zone avant d'être bétonnée pour atteindre un poids total de 145
tonnes.
LA
ZL 1-2 avant sa reconversion
(Photos Sirène et JM Bussy) |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
La porte principale
recouvrant le silo est la seule chose visible en arrivant sur la dalle.
Réalisée en acier et rempli de béton, elle assurait la protection du
missile dans son silo. En cas de conflit, il suffisait
de seulement 23 secondes à partir de l'ordre présidentiel pour lancer
le missile. La porte de 140 tonnes était éjectée violemment à
l'horizontale libérant le missile. La séquence faisait appel à des
vérins à gaz actionné par des blocs de poudre. Le vérin dans sa
course verticale entraînait des câbles attachés à l'arrière de la
porte et provoquait l'ouverture instantanée de la porte. Des essais
réalisés dans les installations du CAEPE près de Bordeaux avaient permis de démontrer
l'efficacité du système. Les 145 tonnes de la porte étaient
instantanément projetées à plusieurs dizaines de mètres,
pulvérisant tout obstacle sur son passage, dont le bâtiment de surface
juste en face.
En temps normal, la porte n'était ouverte que deux fois dans l'année
lors des maintenance ou pour changer les missiles. L'accès au missile se
faisait par l'intermédiaire de portes blindées, dont la principale sur
le dessus,
140 tonnes, épaisse de 1,5 m. Son ouverture nécessitait une procédure
longue de 20 minutes. L'ouverture de la porte d'accès au puits (une
dalle bétonnée de 2 tonnes) nécessitait une autre procédure tout
aussi complexe (ouverture d'une porte métallique, d'une porte étanche
à clés, d'une porte blindée à serrure, retrait du verrou et
alimentation du moteur de soulèvement par le PCT). A coté du silo,
toujours sous la dalle, l'abri auxiliaire contenant les équipements de servitudes.
|
Protocole d'ouverture
1. Démarches d'accès aux mécanismes d'ouverture :
- Ouvrir une première porte métallique, continuité de la cage de
Faraday.
- Ouvrir une porte étanche fermée par condamnation à clé
(détenue par le chef de site responsable de l'intervention).
- Ouvrir une porte blindée munie d'une serrure à combinaison et
d'une condamnation à clé, laquelle était détenue par les
gendarmes de la surveillance de l'armement nucléaire (GSAN)
chargé du contrôle gouvernemental sur les sites militaires
nucléaire
2. Retrait du verrou de la porte à l'aide d'une manivelle qui
nécessitait 20min.
3. Soulèvement de la porte : Action télécommandée depuis le PCT.
Le chef de site donnait son «autorisation d'ouverture de la
porte puits d'accès ». Elle avait pour effet d'autoriser
l'alimentation électrique du moteur de soulèvement de la porte.
|
|
|
La sortie
et l'entrée d'air pour l'abri auxiliaire |
|
|
La porte
blindée de 30 cm de haut pour 1,5 m de coté permettant l'accès
à l'abri auxiliaire. |
Le transport des missiles
depuis la base 200 de St Christol vers les différentes Zones de lancement
dispersées autour dans un rayon de 50 km était une opération très
délicate et sensible. Le missile (20 tonnes) et la partie haute étaient
transportés séparément dans deux convois distincts. Les routes
nationales menant au différentes zone avaient été mise au standard de
l'armée, notamment concernant leur largueur, l'inclinaison des virages et
la hauteur des obstacles. A chaque transport étaient associé une escorte
de gendarmerie mobile pour ouvrir et fermer le convoi. Chaque intersection
de route était protégée et toute circulation civile arrêtée. Une
équipe d'intervention au sol se chargeait de la protection militaire
grâce à des fusiliers commandos dans un véhicule VAB (Véhicule de
l'Avant Blindée) à 4 roues équipé d'une mitrailleuse de 7,62 mm sur
toit. Un camion de pompier (avec lance à mousse) complétait le convoi.
La transmission des
informations télésignalisations, télécommandes, ordres entre les zones
de lancement et le PCT étaient réalisées grâce à un réseau filaire
couvrant toute la zone de déploiement. Contrairement à ce qu'on a pu
penser, nul souterrain entre les ZL. Si un PCT ne pouvait assurer les
liaisons avec ses ZL, l'autre prenait le relais contrôlant 18 ZL. Bien
évidement, ses centaines de kilomètres de fils, câbles étaient
constamment surveillés par les commandos de l'air de l'Escadron de
Protection 21/200, appuyés par des patrouilles au sol, à pied, à cheval
et en l'air par des hélicoptères. Chaque "anomalies"
(coupures, intrusion) étaient signalé au PCT.
En secours, la transmission
était assurée par onde de sol, même en cas d'explosion nucléaire.
Chaque PCT était équipé d'antenne TOS longues de plusieurs centaines de
mètres disposées sous les trottoirs des galeries principales. Chaque ZL
était équipé d'antenne de réception enterré dans le sol et relié à
l'intérieur du silo au niveau -6M.
LES
VEHICULES SPECIAUX |
VTC,
le Véhicule de Transport Charge est nécessaire pour le transport
des têtes nucléaire du missile S2 dès 1968. Il est équipé
d'un équipement Marrel Ampligrue hydraulique du CEA et alimenté par le moteur du
porteur un GR 12 Berliet. Il est équipé en plus d'un système de
conditionnement (température et hygrométrie) nécessaire aux
têts à fission. |
|
|
VTPH,
le Véhicule Transporteur de Partie Haute, utilisé avec le
missile S3 et ses têtes thermonucléaires à partir de 1984. Le
porteur est un Renault R 310 de 309 ch et 18 tonnes de PTC. L'Ampligrue
Marrel
est équipé d'un groupe de fonctionnement autonome. Totalement
déployé, il permet de retirer ou déposer la charge tout seul.
Jusqu'en 1996, il réalisa 708 poses et déposes avec
succès. |
|
|
VTE,
le Véhicule Transporteur Erecteur est en service depuis le début
des années 1960. Il permet le transport du missile de la base aux
ZL. Le tracteur est un Berliet TF 8x4 à 4 essieux avec un moteur
Renault
de 320 ch. Le caisson fabriqué par Latécoère (Toulouse) repose
sur trois essieux et mesure 15 m de long pour un volume de 240 m3.
Grâce à un système hydraulique, il se relève à la verticale
pour faire "glisser" le missile dans son silo. Rénové
en 1992-93, il assurera plus de 370 poses et déposes de missiles.
Trois exemplaires ont été construits. L'ensemble mesure 19,2 m
pour 3,25 de large et 4,11 de hauteur. Il pèse à vide 40 tonnes
et 70 en charge. |
|
|
Les Zones de Lancement
étaient la plupart du temps inhabitées, laissées seules aux
intempéries, surveillé uniquement depuis les postes de tir (détecteurs,
liaison filaires et hertzienne). Une à deux fois par an, une opération
militaire était menée pour changer le missile ou la tête. Une équipe
de garde, généralement d'appelés avec un sous officier se rendait sur
place avec le "camion de la mort", le groupe électrogène pour
préparer l'opération du lendemain. Soit ils dormaient sur place dehors
soit dans le bâtiment de surface.
Le jour, la surveillance
des ZL et des zones sensibles était assurée par les hélicoptères
Alouette de la base de St Christol. Le moindre véhicule qui s'arrêtait
non loin d'elle était immédiatement intercepté par les militaires de la
base de St Christol. Ce qui semblait être une "légende
urbaine" associé à la peur des militaires est un fait véridique.
De nombreuses unités de militaires, des gendarmes mobiles patrouillaient
sans cesse le long des routes nationales menant aux différentes ZL,
quadrillant une zone de 20 km sur 30, entre Ferrassières au Nord, Aurel,
Sault à l'Ouest, Lagarde d'Apt au Sud, Simiane, Revest du Bion à l'Est.
La nuit, chaque équipes d'appelés était chargé de surveiller 5 à 6 ZL.
Chaque missile S3 implanté dans sa ZL avait une
ogive nucléaire d'une puissance de 1,2 Mt (mégatonne
d'équivalent TNT), soit 80 fois la bombe atomique d'Hiroshima.
Pour s'en convaincre, il suffit de voir le résultat sur une
ville comme Aix-en-Provence
la zone de déflagration
(cercle jaune) atteindrait un rayon de 1.04 km, réduisant en
poussière tout le centre-ville,
- le souffle de l'explosion (cercle gris) balayerait la
plupart des bâtiments dans un rayon d'environ 7.4 km jusqu'à
Meyreuil et Venelles,
- les radiations thermiques (cercle orange) s'étendraient
sur une zone de 13,6 km de rayon. Les habitants de Fuveau,
Ventabren ou Meyrargues n'échapperaient pas à des brûlures au
3ème degré, sans compter les retombées radioactives emportées
par le vent.
A titre de comparaison, le cercle orange d'Hiroshima ne faisait
"que" 1,91 km de rayon, tandis que celui de la bombe la plus
puissante actuellement en service (20 Mt dans l'ogive du missile
russe SS-18) atteindrait Marseille, La Ciotat et Cavaillon avec
un rayon de 45 km, soit 1300 fois Hiroshima
|
|