RETOUR A LA PAGE D'ACUEIL

CHRONOLOGIE ARIANE

V88 ARIANE 501

6 janvier 1996, le dernier essai (Q2) de qualification à feu de l'étage principal cryotechnique est réalisé sur la zone de lancement numéro 3 (ELA-3). D'une durée nominale d'environ 600 s, il conclut une série de 7 essais de longue durée et de 2 essais court de l'étage équipé de son moteur vulcain. 
A la suite de ce dernier essai, les équipe démontent la maquette d'essais et préparent la configuration des installations sol, pour recevoir le lanceur Ariane 501 - V87.
24 janvier mise en conteneur de l'étage principale cryotechnique d'Ariane 501 - V88 dans les locaux de l'Aérospatiale aux Mureaux avant son envoi à Kourou.

V88 EPC mureaux1.JPG (81920 octets)

25 janvier, Essai de qualification sur la rupture de la jupe avant de l'étage à poudre, équipé du dispositif assouplisseur chargé d'amortir les oscillations de poussée transmises vers le corps central.
Fin Janvier, Matra Marconispace livre au CNES le premier exemplaire de vol de la case à équipement du lanceur Ariane 5.

7 février, la Revue de Qualification Lanceur (RQL) présente ses premières conclusions devant les directeurs généraux de l'ESA et du CNES.
Du 19 au 21 février, présentation de la Revue d'Aptitude au vol (RAV). L'ensemble des éléments fournis autorise le démarrage de la campagne de lancement d'Ariane 501 - V88.
28 février livraison des deux propulseurs à poudre d'Ariane 501 par Aérospatiale.

V88 arrivée EPC.jpg (135121 octets)

V88 EPC 02.jpg (58782 octets)

4 mars, début officiel de la campagne de lancement d'Ariane 501au bâtiment d'intégration lanceur (BIL) avec l'érection de l'étage principal cryotechnique sur la table de lancement.


11 mars, les deux propulseurs à poudre d'Ariane 501 sont mis en place sur l'étage principal cryotechnique.
19 mars, débuts des essais électriques
29 mars, début des contrôles d'étanchéité.

22 avril, reprise de la préparation des satellites Clusters en vue des opérations combinées entre le lanceur Ariane 501 et les satellites.
24 avril, transfert de la partie basse du lanceur vers la zone de lancement.
25 avril, répétition système Lanceur (RSL). L'essai de remplissage de l'étage cryotechnique permet également de valider, dans la configuration de vol, les programmes automatiques de lancement :
- séquence synchronisée,
- passage en gestion de programme de vol,
- reprise en main des calculateurs sol en cas d'anomalie.
La dernière partie de la campagne de lancement peut alors commencer au bâtiment d'assemblage final (BAF).

V88 BAF 01.jpg (111431 octets)

8 mai, la Revue de Qualification Lanceur (RQL) présente son rapport final devant Jean-Marie Luton directeur de l'ESA et Alain Bensoussan directeur du CNES.
les 10 et 11 mai, la charge utile est mise en place sur le lanceur. Les quatre satellites Cluster permettrons de mesurer et de déterminer exactement et en trois dimensions les phénomènes qui concernent la magnétosphère. Ils permettrons aussi l'étude des structures de plasma à petite échelle dans l'espace et dans le temps dans des régions telles que la magnétopause, la queue de la magnétosphère et les régions aurorales et polaires. Les quatre satellites évolueront dans l'espace en formation tétraédrique, c'est-à-dire en forme de pyramide irrégulière à base triangulaire, sur une orbite très elliptique, de 19000 à 119000 km de la Terre.
20 mai, début des opérations de remplissage du Système de Contrôle d'Attitude de l'étage à propergols stockables.
23 mai, suite des opérations de remplissage de l'étage à propergols stockables (EPS). A la suite d'une fuite au niveau d'une interface sol et de problème de pompes de remplissage, les opérations de remplissage sont plus longue que prévu.
30 et 31 mai, la Revue d'Aptitude au Lancement (RAL) autorise le vol Ariane 501

3 juin, la chronologie de lancement débute à 05h00 (heure de Kourou) avec le transfert d'Ariane 501 vers la zone de lancement. 

V88 transfert 01.jpg (23070 octets)    V88 transfert 02.jpg (87397 octets)

L'après-midi est consacré au retrait des dispositifs de maintien du lanceur sur la table de lancement, puis au remplissage du sous-système hélium liquide.

V88 pad 01.jpg (128425 octets)    V88 pad 02.jpg (38684 octets)    V88 pad 03.jpg (47908 octets)

 

4 juin, à 01h30 du matin (Heure de Kourou) les opérations de remplissage de l'étage cryotechnique débutent. Le lanceur est prêt pour entrer en séquence synchronisée environ une heure avant le moment H0 visé prévu à 08h35mn. A 08h15mn (H0-20mn), un risque de foudre étant signalé par les services de météorologie, le compte à rebours s'arrête pendant une heure. A 09h35mn décollage du lanceur Ariane 501 - V87 après une séquence synchronisée sans aucun arrêt. 

V88 allumage EPC.jpg (189892 octets)

V88 launch 01.gif (155649 octets)

V88 launch 02.jpg (49853 octets)    V88 launch 03.jpg (55826 octets)    V88 launch 04.jpg (50920 octets)

A 09h35mn37sec, soit après 37 secondes de fonctionnement, des ordres de braquage maximum sont envoyés vers les moteurs des étages à poudre, puis vers le moteur Vulcain. Le lanceur bascule brutalement par rapport à sa trajectoire et se met alors à subir des efforts aérodynamiques qui provoque sa destruction à H0+40sec.

V88 explosion 01.jpg (46925 octets) V88 AR501 explosion 02.jpg (21598 octets)
V88 AR501 explosion 03.jpg (16912 octets)

 

VIDEO: Lancement d' Ariane 501 (2Mo 30s)

Les débris du lanceur V501 sont retombés au sol, sur une zone de 5 x 2,5 km2, à l'est du pas de tir. La tâche de récupération s'annonce toutefois des plus difficiles, car cette région se compose, pour l'essentiel, de mangrove et de savane ; celles-ci sont gorgées d'eau, après la saison des pluies qui vient de s'achever.

V88 nuage 01.gif (64857 octets)    V88 zone de retombe.gif (94826 octets)

Seulement quelques jours après l'échec de V501, les experts arrivent à situer grossièrement la cause du dysfonctionnement. Les analyses de la télémesure montrent, en effet, qu'à H0 + 36,7 secondes, les deux centrales inertielles (S.R.I.) sont, successivement, tombées en panne. Des informations manquent, cependant, pour pousser plus en avant les investigations. On ne dispose pas, en effet, de certaines données de télémesure du système qui a travaillé en mode actif et qui a été le dernier à fonctionner (la transmission au sol de ces renseignements n'étant prévue que pour l'unité qui tombe en panne la première).

Un ratissage aérien, au moyen de photographies, détermine une quantité impressionnante de débris. La campagne de récupération étant limitée dans le temps (et aussi financièrement), il faut fixer des priorités. Priorité donc pour ramener au sec, la case à équipements qui renferme, entre autres, les deux S.R.I.. En parallèle, d'autres équipes vont s'efforcer de trouver les quatre charges utiles Cluster. Finalement, il est impératif d'inspecter tous les éléments pyrotechniques pour en désamorcer les charges éventuelles.

Toutes les compétences opérationnelles du Centre Spatial Guyanais sont mises à contribution : 
_les démineurs, pour déconnecter les éléments pyrotechniques encore armés ;
_
les pompiers de la Brigade des Sapeurs Pompiers de Paris, détachés sur le C.S.G. toute l'année. Ils ont montré, entre autres, leur aptitude à plonger dans les marécages avec une visibilité nulle !
_ les ingénieurs du projet Ariane-5, qui mieux que personne connaissent parfaitement leur matériel ; 
_ l'équipe de planification et de coordination opérationnelle de la Division des Opérations, pour assurer l'ensemble de la logistique, atypique, de la campagne.

Le déplacement sur les terrains inondés a été rendu possible grâce aux moyens humains et matériels du Troisième Régiment Etranger d'Infanterie (Légion Etrangère). Les «chenillettes» et les soldats du 3ème R.E.I ont permis d'atteindre rapidement les débris dans cette végétation dense.

Au terme d'un mois de dur labeur quotidien sous un soleil de plomb, les principaux objectifs sont atteints. La case à équipements (et surtout ses deux S.R.I.) et les satellites Cluster sont récupérés et renvoyés en Europe. 

        

Les moteurs des E.A.P. sont désarmés puis examinés sur place. Enfin, divers éléments du lanceur sont ramenés vers l'ELA-3, dont, en particulier, des morceaux parfois volumineux de la coiffe. 

             récupération des éléments de la coiffe. A noter, en jaune et argent au premier plan, les «coupelles» d'isolation phonique de la coiffe : les satellites sont ainsi protégés des fortes vibrations sonores lors du décollage. T Vallée

Tandis que le Rapport d'Enquête sur l'échec du vol V501 est pratiquement prêt, d'autres analyses de la télémesure d'Ariane-5 ont montré que, au moment de la perte du lanceur, la turbo-pompe hydrogène (TPH) du moteur cryotechnique Vulcain fonctionnait 10% en deçà de son régime nominal. La S.E.P. demande donc de pouvoir récupérer le moteur à des fins d'expertise.

Cette opération, envisagée dès le début du mois de juin, avait dû être abandonnée (du moins temporairement) car le Vulcain, accroché à son bâti, est très difficilement accessible. L'ensemble pèse, en effet, plusieurs tonnes, et la chute depuis près de quatre kilomètres d'altitude, s'est terminée quelques mètres sous l'eau, dans la vase. Cette fois-ci, le feu vert est donné pour ressortir le joyau d'Ariane-5, avec tous les moyens que l'on trouvera en Guyane (le matériel du C.S.G., quoique très performant, n'est pas adapté à une telle mission).

Par chance, une entreprise de Cayenne possède une grue montée sur flotteurs, qui devrait faire l'affaire. Cet engin, très agile dans l'eau, a cependant du mal à atteindre les marais (il lui faut plus d'une journée pour couvrir cinq cents mètres sur la terre). C'est finalement au terme de dix journées difficiles, que le Vulcain est extrait de ce milieu nauséabond, après un travail efficace des plongeurs de la B.S.P.P. qui ont réussi à trouver les bonnes prises pour hisser le moteur. En relatif bon état après une bonne «douche» (comme en juge la photographie ci-dessous), le moteur cryotechnique a subi les examens désirés. 

V88 debris 08 Vulcain.jpg (189143 octets)

Autre élément récupéré, au hasard des traversées de la mangrove : la partie supérieure du Réservoir Isolé Equipé (R.I.E.). Ce complexe «bout de tôle» se situe au sommet de l'Etage Principal Cryotechnique (E.P.C.), et porte le système mécanique de remplissage du réservoir d'oxygène liquide. La photographie, ci-dessous, montre la violence de l'explosion en vol et de la chute effrénée qui s'en est suivie.

V88 debris 07 RIX LOX.jpg (146647 octets)

23 juillet, la commission d'enquête sur les causes de l'échec du premier vol d'Ariane 5 remet son rapport :
Après un décollage normal la fusée a eu un comportement nominal jusqu'à la 36ème secondes de vol. Puis les systèmes de référence inertielle (SRI) ont été simultanément déclarés défaillants. Sur la base d'informations de diagnostic du SRI traitées comme des instructions de vol, le calculateur de bord a provoqué le braquage en butée des tuyères des boosters, puis du moteur Vulcain d'Ariane 5 qui jusque là suivait parfaitement sa trajectoire de vol. C'est ce braquage intempestif des moteurs qui faisant brusquement basculer le lanceur l'a amené à se briser sous les efforts aérodynamiques et à exploser en vol, peu avant sa destruction télécommandée. Le SRI n'a pas transmis de données correctes parce qu'il était victime d'une erreur d'opérande trop élevée du "biais horizontal" de la fonction d'alignement interne de la centrale. Le calcul de cette variable est lié à la vitesse horizontale détectée par la plate-forme inertielle. 
Or, sur Ariane 5, l'accélération au décollage est beaucoup plus forte que sur Ariane 4, et la vitesse horizontale s'accroît cinq fois plus rapidement. La variable a donc dépassé la plage des valeurs autorisée par le logiciel de vol. La fonction d'alignement qui reste active environ 40 secondes après est une exigence d'Ariane 4 mais n'a aucune utilité sur Ariane 5. Elle a cependant été maintenue pour des raisons de commodité. La fonction comprend sept variables dont seulement quatre sont protégées. Lors de la conception, il n'avait pas été jugé nécessaire de protéger le calculateur contre un arrêt de fonctionnement dû à une valeur excessive de la variable lié à la vitesse horizontale. Cette décision a été prise sans que l'on analyse ou comprenne parfaitement les valeurs que cette variable pourrait prendre lorsque la fonction d'alignement est autorisée à fonctionner après le décollage.

 

LE RAPPORT D' ENQUETE SUR ARIANE 501

1997, Jean Yves Henrion et Thierry Vallée