Mis en service avec Ariane 5, le moteur
Vulcain a été développé par Snecma Moteurs. La maîtrise d'œuvre du
programme Vulcain lui a été confiée par le CNES, qui assure pour le compte de
l'Agence Spatiale Européenne la direction technique et financière du programme
Ariane 5. Dans ce cadre, Snecma Moteurs pilote une vaste coopération
européenne rassemblant une quarantaine d'entreprises, parmi lesquelles EADS
Astrium (chambre de combustion), FiatAvio (turbopompe oxygène liquide) et Volvo
Aero (divergent de tuyère), mais aussi Techspace Aero, en charge des vannes
cryogéniques. Le moteur Vulcain
délivre 1 145 kN (115 tonnes) de poussée à l'étage principal du lanceur
pendant près de 10 minutes de vol.
Après une phase d'études préliminaire à
partir de 1984, le développement a réellement débuté en 1988 suite à la
décision de lancement du programme Ariane 5 par les ministres européens lors
de la conférence de La Haye.
Répartition géographique des contractants du
Vulcain
Les différentes configurations et performances
d'Ariane5 dans le concept retenu en 1985, dit Ariane 5P reprennent un
étage central cryogénique commun le H120 et deux propulseurs P170 avec
comme étage supérieur, le L4 à ergols stockables et le H10 cryogénique.
Ce concept a nécessité de développer un nouveau moteur cryogénique, le
HM60 de 60 tonnes de poussée. La SEP, MBB-Erno (Allemagne) et Volvo (Suéde)
se sont associés pour préparer le dossier. Ce HM60, "Vulcain" sera
qualifié en 1994. Ariane 5 diffère ses précédentes versions du lanceur
Européen. D'un concept dérivé d'Ariane 4, avec un nouveau second étage
cryogénique, le choix s'est imposé en 1984 à une Ariane 5 P capable de
placer 4500 kg en GTO en 15 tonnes en LEO. La définition du moteur
cryogénique de la version A5P a été fondé sur des analyses de système:
fonctionnement de la chambre à haute pression 100 bar, moteur à cycle
dérivé et turbopompes séparées pour le LH2 et le LOX. Un générateur
unique alimentera les 2 turbines. Haut de près de 3 mètres, le Vulcain a
un diamètre en sortie de tuyère de 2 mètres. La poussée atteint 100
tonnes durant 500 secondes. L'hydrogène liquide
passe après la mise en pression de la turbopompe (160 bars) par les
parois externes de la chambre avant d'être introduit dans l'injecteur.
35 kg par seconde est consommé. Une partie est dévié pour assurer le
refroidissement de la tuyère au travers de 460 tubes en Iconel assemblés
par soudure en hélice à diamètre croissant pour donner la forme de
coquetier au divergent. Cet hydrogène est ensuite réinjecté dans la
tuyère participant à la poussée du moteur.
Pour les essais, outre les bancs destinés à tester
chaque composant, un banc PF52 sera construit à Vernon sur le site de la
SEP pour tester les turbopompes et un banc P3.2 à Hardthausen sur le
site de la DFVLR pour tester la chambre de combustion. Pour les essais
moteur complet, Vernon aura le banc PF50 et Hardthaussen le P5. 80
essais par an sont prévus pour des durées allant jusqu'à 500-600 s. Le
banc utilisé à Ottobrunnpar MBB-ERNO pour l'étage H8-H10 sera réutilisé
pour tester le générateur de gaz. Pour la dizaine d'essais avec étage,
les tirs se feront depuis les installations ELA 3 du CSG avec des étages
lourds et en configuration de vol.
La plaque d''injection de la chambre
après implantation des 566 éléments d'injection par le procédé de brasure
par diffusion. |
Après des essais au niveau des composants,
les essais moteurs ont débuté en avril 1990. Le fonctionnement du moteur
Vulcain sur étage a en outre été étudié en Guyane sur le pas de tir, à
partir de fin 1994.
FiatAvio a contracté Volvo Aerro (Suède) pour la fourniture de 57 tuyères et
turbines pour Ariane 5. Le contrat est de 4 turbines LOX utilisé dans le moteur
Vulcain 1 et 19 autres pour le Vulcain 2. Volvo développe aussi 17 turbines LH2
et 17 tuyères pour le Vulcain 2. la firme qui produira aussi les tuyères pour
le moteur US RL60 a 25 ans d'expérience derrière elle puisqu'elle a réalisé
les tuyères des moteurs Viking d'Ariane depuis 1978.
Le moteur de l' EPC, est le Vulcain. Conçu par la Snecma, ce moteur a une poussée
moyenne de 1125 kN soit au niveau du sol (115 tonnes). Le Vulcain engloutit 1250 kg/s de gaz chaud à
3300°C et sous une pression de 110 bars. 516
injecteurs pulvérisent sous haute pression, l'hydrogène et l'oxygène. La
chambre de combustion est elle-même refroidie par de l'hydrogène liquide
prélevé dans le circuit. La tuyère du moteur permet
d'orienter les gaz qui sortent à quelques 4 km/s (14400 km/h). Il s'agit en
fait d'un enroulement en hélice de 456 tubes dans lequel circule de
l'hydrogène liquide afin de la refroidir et éviter qu'elle
fonde.
L'alimentation du moteur se fait grâce à
deux turbopompes (pompes à haute vitesse) :
_ la pompe à hydrogène, qui tourne à 33000 tr/min. Elle développe une
puissance de 15 MW soit 21000 chevaux. C'est l'équivalent de la puissance de
deux rames de TGV ! Cette turbopompe est le fruit de longues études menées sur
les roulements et les matériaux car la pompe atteint, par paliers, des vitesses
critiques où le rotor de la pompe (partie mobile) doit être parfaitement
équilibré.
_ la pompe à oxygène tourne à 13000 tr/min. Elle développe une puissance de
3,7 MW. Toutefois, elle n'atteint pas de vitesse critique. Il s'agit surtout
d'étudier des matériaux qui n'entrent pas en combustion avec l'oxygène
véhiculé.
Ces deux pompes sont alimentées par une
turbine dite générateur de gaz chauds. Cette turbine est comme une seconde
chambre de combustion qui prélève environ 3% du combustible. Cette pompe
permet de fournir l'énergie à la propulsion des deux pompes. Les gaz produits
entraînent les pompes et sont ensuite rejetés par deux petits tubes situés de
par et d'autre de la tuyère principale du moteur.
Le moteur est démarré au sol afin que l'on puisse contrôlé son
fonctionnement avant l'allumage irréversible des deux boosters EAP. Le moteur
est allumé par un démarreur à poudre qui lance les turbopompes et de petits
explosifs qui allument la combustion dans les chambres de combustion.
Le moteur et sa tuyère mesure 3 m de haut et 1,76 m de diamètre pour 1685 kg.
Il va fonctionner durant un vol normal, a peu près 10 minutes. Le moteur est
testé pendant environ 7 secondes. En cas d'anomalie, on le coupe et le
lancement est reporté. Mais, si tous les systèmes répondent, on allume les
EAP et Ariane 5 décolle instantanément.
Un autre système d'hélium permet de
pressuriser des canalisations servant à l'alimentation des pistons pneumatiques
pour contrôler l'inclinaison le moteur. Les deux réservoirs de 300 litres sont
mis sous la pression de 390 bars. Ils sont construits en un composite carboné
et en titane.
La poussée fournit par le moteur est transmis
à l'étage via le bâti-moteur, une structure triangulaire métallique portant
le moteur. Ensuite, la force est transmise via la structure extérieure du
réservoir. Au sommet en forme de dôme de l'EPC, on place la jupe avant qui
transmet la force au reste du lanceur.
Au moment du premier vol, le 4 juin 1996, le
moteur Vulcain cumulait une expérience de 285 essais, totalisant 85000 secondes
de fonctionnement. Les essais sont conçus pour démontrer que le moteur
satisfait les spécifications, mais aussi pour rechercher les limites du
matériel (endurance, tolérances aux pannes) afin d'asseoir la fiabilité sur
des bases éprouvées. Le développement du moteur Vulcain a été
assuré par une coopération européenne sur financement de l'ESA (Agence
Spatiale Européenne). Le CNES (Centre National d'Etudes Spatiales) a assuré la
direction technique et financière du programme et a confié la maîtrise
d'oeuvre à Snecma Moteurs.
Outre le développement complet du moteur et
les essais réalisés sur deux installations redondantes à Vernon (France) et
à Lampoldshausen (Allemagne), Snecma Moteurs a développé elle-même la
turbopompe hydrogène, le générateur de gaz et ses vannes d'alimentation.
Astrium (Allemagne) a développé la chambre de combustion avec sous-contrat à
Volvo Aero Corp. (Suède) pour le divergent et à MAN Technologie (Allemagne)
pour le cardan et la protection thermique. Fiat Avio (Italie) a développé la
turbopompe oxygène, Volvo Aero Corp. (Suède) les turbines hydrogène et
oxygène, Techspace Aero (Belgique) les vannes d'injection chambre, les vannes
de purge et la vanne gaz chauds, Microtechnica (Italie) les électrovannes et
clapets anti-retour, SPE (Pays-Bas) les équipements d'allumage et démarrage,
AVICA (Grande Bretagne) les lignes d'alimentation et DEVTEC (Irlande) les
supports.
Ainsi Vulcain n'a pas été qu'une gageure
technique, ce fut également un défi en termes de gestion de projet, mené à
bien par Snecma Moteurs.
Fin 2000, le moteur Vulcain cumule plus de 132
700 secondes en 392 cycles de fonctionnement: essais au sol et les neuf premiers
vols d'Ariane 5.
PRINCIPE DE FONCTIONNEMENT
La conception du moteur cryogénique Vulcain est basée sur le
cycle à flux dérivé, où les turbopompes qui alimentent la chambre sont
entraînées par la combustion, dans un générateur de gaz, des ergols
prélevés (3%) sur le circuit principal. Ce cycle offre une performance
raisonnable tout en permettant d'accroître la fiabilité et de diminuer le
coût.
Il est alimenté par deux réservoirs
superposés à fond commun contenant 132 tonnes d'hydrogène et 26 tonnes
d'oxygène à très basse température. Deux lignes de 185 mm de diamètre
alimentent le moteur. Elles possèdent une certaines souplesse afin de faciliter
les déplacements pendant la mise en froid et le pilotage en vol du moteur.
Sur ces lignes on trouve les vannes d'alimentation, le système correcteur pogo
SCP implanté sur la ligne LOX (une cavité cylindrique remplit d'hélium)
agissant comme amortisseur réduisant le couplage entre les vibrations de
structures des lignes, les fluctuations de débits et les modulations de
poussée induites créateur de vibrations capable de détruire le lanceur ou
endommager les satellites.
Le système de pressurisation des réservoirs permet la tenue structurelle des
réservoirs et assurent une alimentation régulière du moteur en ergols. Le
réservoir LOX est pressurisé par 141 kg d'hélium liquide (7°K et 19 bar) qui
réchauffé au contact de l'échappement de la turbine remonte dans le
réservoir avec un débit de 0,2 kg-s. La régulation est faite par des vannes
montées sur "une platine". La pressurisation du réservoir LH2 est
directement assuré par de l'hydrogène gazeux prélevé en amont des injecteurs
du moteur, à 120 bar et 100°K, puis introduit à raison de 0,4 kg-s dans le
réservoir.
Le système de commande fournit l'énergie pneumatique de servitude de l'étage
et active sur ordre électrique, les vannes de mises en oeuvre pour le vol. Il
utilise de l'hélium stocké sous 350 bar dans deux sphères de 300 l. Une
"platine gonflage détente" regroupe la vanne nécessaire à leur
remplissage et une vanne suivie d'un détendeur pour alimenter les boîtiers d'électrovannes LOX et
pressurisation, LH2 et pressurisation et alimentation
moteur, générateur de gaz et mise en froid des roulements de turbopompes.
L' étage EPC est posé sur la table de
lancement et raccordé au sol par les Liaisons Bord-Sol qui permettent le
remplissage sur le pad en ergols, la mise en froid des circuits d'alimentation,
l'assainissement des tuyauterie et le balayage de la baie de propulsion avec de
l'azote gazeux afin d'éviter l'accumulation d'hydrogène
gazeux.
|
Les
liaisons bord-sol LBS de l' étage EPC avec en:
1/ Ligne de pressurisation LH2 et remplissage réservoir LH2
2/ Réglette de destruction
3/ Ligne d' alimentation LOX
4/ Réglette de destruction
5/ Ligne de pressurisation LOX et remplissage LOX
6/ Sphère de pressurisation réservoir LOX (145 kg d' hélium)
7/ Sphère de pressurisation du système GAM (hélium) |
La poussée (1 140 kN) est obtenue par
éjection à grande vitesse (4000 m-s) du débit de gaz (250 kg/s) produit par la
combustion à haute pression (110 bar) et haute température (3 500 K) des
ergols dans la chambre de combustion. L'oxygène liquide (comburant) et
l'hydrogène liquide (carburant) sont introduits dans la chambre à raison de
200 et 600 litres par seconde à travers un
injecteur frontal consistant en 516 éléments coaxiaux qui assurent la
pulvérisation et le mélange. Du fait de la température élevée de
combustion, la chambre est refroidie par circulation de l'hydrogène dans 360
canaux longitudinaux usinés dans la paroi.
Le divergent assure l'accélération des gaz
en régime supersonique jusqu'au maximum permis par la pression ambiante soit 4
000 m/s. Il est constitué de 456 tubes enroulés en hélice et refroidis par
circulation d'hydrogène, selon le procédé de "dump cooling". Deux
tuyères auxiliaires de chaque coté assurent l'échappement des gaz du
générateur et participent également à un complément de poussée.
L'alimentation du moteur en ergols à haute
pression se fait par deux turbopompes indépendantes :
_ la turbopompe hydrogène tourne à
33 000 tr/min et développe une puissance de 12 MW. Elle est constituée d'une
pompe à deux étages centrifuges associés à un inducteur axial et d'une
turbine supersonique à deux étages. Elle est pourvue d'un dispositif
d'équilibrage permettant de diminuer les charges axiales sur les roulements.
Elle fait l'objet d'études et d'essais sur la dynamique du rotor
particulièrement poussés, car pour atteindre sa vitesse en palier elle doit
franchir des vitesses critiques pour la stabilité du rotor.
_ la turbopompe oxygène tourne à 13
000 tr/min, développe une puissance de 3,7 MW et fonctionne en dessous de sa
première vitesse critique. La composition de ses matériaux est étudiée pour
minimiser les risques de combustion des métaux dans l'oxygène, en cas de
frottements excessifs.
L'énergie nécessaire au fonctionnement des
deux turbines est fournie par des gaz de combustion produits dans un
générateur de gaz unique. Un fort excès d'hydrogène a pour effet de limiter
la température des gaz, tout en les rendant réducteurs, de façon à protéger
les aubes de turbine.
Le démarrage du moteur se fait au sol afin
que son fonctionnement puisse être contrôlé avant l'allumage des étages à
poudre du lanceur et son décollage. Il est assuré par un démarreur à poudre
qui met en vitesse les turbopompes et ce sont des allumeurs pyrotechniques qui
initient la combustion dans la chambre et le générateur.
Les vannes sont actionnées par des vérins
pneumatiques alimentés en hélium gazeux au moyen d'électrovannes. Le moteur
est orientable pour assurer le pilotage du lanceur. Le rapport de mélange peut
être modifié en commutant la vanne d'alimentation de la turbine oxygène, ce
qui réserve la possibilité d'aboutir à un épuisement quasi simultané des
deux réservoirs.
Enfin la partie haute du moteur est enfermée
dans une protection thermique destinée à l'isoler du rayonnement des jets des
Moteurs à Propergol Solide.
CARACTERISTIQUES TECHNIQUES
|
Poussée
totale dans le vide |
1 140 kN
|
Poussée
totale au sol |
885 kN
|
Impulsion
spécifique dans le vide |
431,2 s
|
Pression
de combustion |
110 bar
|
Rapport
de section |
45
|
Temps
de fonctionnement en vol |
575 s
|
Durée
de vie |
6000 s + 20 démarrages
|
Fiabilité |
0,9946
|
Hauteur |
3 m
|
Diamètre
(sortie de tuyère) |
1,76 m
|
Masse
totale |
1 700 kg
|
Débit
d'ergols |
|
Total |
271 kg/s
|
Chambre |
262,2 kg/s
|
Générateur |
8,8 kg/s
|
Rapport de mélange
moteur |
5,3
|
Turbopompe |
LOX
|
|
Type |
1 étage axial
|
Puissance des
turbines |
2 000-4 800 kW
|
Vitesse
de rotation |
11 000-14 800 tr/min
|
Pression de
sortie |
45-88 bar
|
Pression
d'entrée |
3,5-7,8 bar
|
Température |
760-950 °K
|
Turbopompe |
|
|
Type |
2 étages axials
|
Puissance des
turbines |
7 400-15 500 kW
|
Vitesse
de rotation |
28 500-36 000 tr/min
|
Pression de
sortie |
52-102 bar
|
Pression
d'entrée |
2-6 bar
|
Température |
760-950 °K
|
Photos et infos SNECMA et Volvo
|