PHOTOGRAPHIER LE SPATIAL
Le principal inconvénient à photographier un lancement est que cela va vite très vite et qu'il n'y a pas de seconde chance. On l'a ou on l'a pas ! La distance a aussi son importance. Dans le pire des cas, on se trouve à 10 km, dans le meilleur à 1,4 km. Pour avoir une photo où le le lanceur ou le Shuttle occupe au moins 50% de l'image, inutile de compter sur un APN compact, même avec le zoom au maximum. La seule solution, le reflex avec un téléobjectif ou un zoom avec une focale minimale de 400 mm. PHOTOGRAPHIER LE SHUTTLE Pour
STS 122, je suis équipé d'un zoom Canon 100-400 L associé à un
boîtier numérique 350D et un zoom 18-200 mm associé à un autre
boîtier 350D. Le lancement se faisant de jour, je n'ai pas de pied, la
luminosité étant très bonne pour pouvoir travailler à des vitesses
de 1/500 de secondes ou plus avec un diaphragme de 6 environ à 400 mm
de focale. Pour être sur du coup, je travaille en A sur le boîtier,
mesure d'exposition en multi zone. De plus, je suis relativement près,
sur Banana Creek à 6,35 km du pad de tir. Pour les lancements en plein
jour, il est pratiquement impossible de rater ces photos avec un reflex
et un zoom, le seul truc à surveiller est la mise au point. Comme celle
ci se fait généralement en appuyant à mis course le déclencheur,
elle est refaire à chaque photo ou presque. Comme le Shuttle s'éloigne
de votre point de vue et rapetisse, l'autofocus aura tendance à patiner
dans le vide avant de se caler dessus.
Lors de son ascension, le Shuttle s'éloigne de moi. On voit bien sur le crop 100% de l'image originale que le voile atmosphérique a complètement disparu. L'image est bien plus nette. A droite, vue générale depuis Banana creek. A titre d'exemple, voici deux photos extraites d'un APN compact de 7 Mp (Sony DSC S700) à la focale maxi male (17 mm soit 105 mm de focale équivalent 35 mm)) en définition maximale (3072x 2304 p) prises au 1/400 s et à F2,8, taille originale et crop 100%.
Pour STS 126, les choses se compliquent. C'est un lancement de nuit et je suis plus loin que pour 122 sur la Causeway à 10 km. Le Shuttle me fait face. Dans la nuit, il est éclairé par de puissant projecteur, mais à cette distance, il est encore trop petit. J'ai à peu près le même équipement que pour 122. Un zoom Canon 100-400 L et un zoom GA Sigma 10-20 mm avec un nouveau boîtier le 40D toujours de chez Canon. Pour ce voyage, un pied "manfrotto" 190X m'accompagne avec une tête "ball" à pince (322RC2) qui permet de bloquer l'appareil en position. Je vais réaliser deux types de photos: le lancement proprement dit avec le zoom et une pose longue en grand angle. Le zoom 10-20 mm est vissé sur un boîtier et monté sur un petit pied Gorillpod. L'ensemble est posé sur l'herbe devant moi sur le coté avec une télécommande à fils. Je fais une mise au point vers l'infini et je règle mon APN sur 100 ISO, F22 et pose "B". L'appareil est déclenché à T-10 secondes jusqu'à MECO, extinction des moteurs au bout de 8mn de vol. Voici le résultat, je n'y croyais pas ! A gauche, l'image brute (taille réduite) et l'image traitée. Le zoom 100-400 L est vissé sur l'autre boîtier et monté sur un pied Manfrotto. Premier constat, il y a du vent sur la Causeway et le zoom bouge. Je leste le pied avec un sac de sable qui tenait initialement un poteau de marquage en bordure de la mer. Ça bouge moins, mais ça bouge quand même. A 10 km, le Shuttle est petit même à 400 mm de focale. Il ne remplit que 10% de l'image. Pour ce lancement, je décide de télécommander mon boîtier et de regarder le décollage avec mes yeux directement. On s'installe comme on peut sur la Causeway. Le boîtier avec le GA est au pied du petit mat qui délimite le terrain. A mes cotés se trouve Jeanine Lovett et et Dave Hartley, deux photographes de la cote Ouest des Etats Unis. Buran
et moi sommes prêt pour le lancement. Le sac de sable suspendu au pied photo
sert à éviter les vibrations dues au vent sur le zoom. Le Shuttle est au
loin, c'est le petit point juste au dessus de l'APN. Si pour un lancement de jour, un APN compact peut vous sauver la vie, n'espérez rien lors d'un lancement de nuit. Ces deux photos ont été prises depuis le KSC Visitor, à 13 km du pad de tir par un Canon PowerShot A1000 IS. La première image est prise avec une vitesse d'exposition de 1 seconde et une ouverture de 2,7 sous 400 ISO. La seconde est plus nette, c'est la meilleure du lot, elle est prise à 1/50 s, les deux à la focale minimale de 6,2 mm (équivalent 35 mm en 24x36). Quelques recommandations
d'objectifs à utiliser selon l'endroit où vous étes. PHOTOGRAPHIER LA SOYOUZ Entre deux lancements de Shuttle, j'ai assisté au lancement d'une fusée Soyouz depuis Baikonour pour le vol "taxi" TMA 12 vers ISS avec la cosmonaute Sud Coréenne. Le cosmodrome de Baikonour n'est pas Kourou et encore moins le centre Kennedy. La-bas, pas de "Mickey market", d'autocars climatisés et des milliers de visiteurs par jour. Baikonour n'est "ouvert" au public que très rarement, au moins deux fois par an pour les lancements de Soyouz vers ISS, moyennant la coquette somme de 6000 euros ! Le reste du temps, il reçoit la visite de délégations spéciales associées à un lancement. Pour cette expérience, nous n'étions qu'une vingtaine d'européens parmi des centaines de coréens venus soutenir leur cosmonaute. Les russes n'ont pas la même mentalité que les occidentaux et cela se ressent au plus profond du Kazakhstan. Pour qui a déjà visiter les bases spatiales occidentales, Baikonour fait un peu "foutoir" abandonné. On a l'impression que la sécurité ne les concernent pas. Quand on a compris comment çà marche, on peut faire un peu se que l'on veut. Et on ne s'en est pas privé ! Le Baikonour Tour profite de ce lancement pour nous faire visiter l'ensemble de la base. Le dernier jour coïncidant avec le lancement. Nous sommes au début du mois d'avril, on devrait s'attendre à se qu'il fasse froid. Il n'en fut rien. Il avait neigé 15 jours avant, mais c'est une chaleur écrasante qui nous accueille à la descente de l'aéroport. Elle ne nous quittera pas jusqu'au retour. Si la sécurité est de règle chez nous à Kourou et au KSC, il n'en ai pas de même à Baikonour. Après avoir suivit le lanceur de son hangar d'assemblage jusqu'au pas, le long de la voie ferrée, nous nous retrouvons avec une centaine de Coréens sur le pad de tir même, telle des fourmis à la recherche d'un morceau de pain. A seulement quelques mètres du lanceur, nous assistons à sa mise en place sur la table de lancement avec les ingénieurs russes. Nous pouvons même visiter le hangar ou attendent les étages du prochain lanceur à partir pour l'espace. Mardi 8 avril 2008, après une rapide visite du musée de Baikonour, nous reprenons notre car pour le site d'observation 18 à seulement 1500 m du pad de tir. Et là, je prend réellement conscience que je suis extrêmement prêt du lanceur. Au KSC, j'étais à 5-6 km, à Kourou, les premiers observateurs sont à 5 km (Toucan). Ici, 1390 m! Si jamais il devait arriver quelque chose, on prendrait tout sur le coin du nez! Ce moment de frayeur passé, je prend place juste à coté de la tribune "officielle" devant une barrière. Je vois devant moi d'autres personnes qui sont encore plus près du lanceur. Certains doivent être à moins de 1000 mètres. Vue
générale du pad de tir (40 mm de focale, équivalent de ce que voit l'œil
humain). J'ai à peu près le même équipement que pour STS 122 en Floride, deux mois auparavant. J'ai "échangé" un boîtier 350D contre un 40D. Comme pour STS 122, je "shoote" en Jpeg directement pour garder une cadence de prise de vue en rafale élevée. Je suis à 100 ISO, en mode priorité vitesse (1/750 s) ouverture maximale du 100-400 mm, soit F5,6. L'image de la Soyouz remplir presque le cadre de visé (80%). Comme pour STS 122, pas de pied, je shoote à main levé. Le lancement du Soyouz TMA 12 au 400 mm avec deux crops 100%
PHOTOGRAPHIER ARIANE 5 J'avais tablé sur un
lancement de nuit pour Ariane 5, la majorité des tirs Arianespace se
faisant à 19h locale. Par chance ou malchance, le vol 192 est un
lancement de jour à 17h. Pour ce nouveau "défi", j'ai donc mon nouveau
pied plus lourd et plus
haut, un Gitzo et une tête pendulaire Benro (dans le style de la
Winberley). Mon premier boîtier (avec le 100-400 mm L) est déclenché par
une télécommande à fils. J'ai aussi posé sur mon sac à dos, une caméra
DV. Mon autre boîtier équipé d'un 24-105 mm ne sert pour des vues
d'ensemble. Le lancement au 100-400 L à 400 mm 1/200 s, F7, 200 ISO (traitement du raw) Juste avant la disparition dans les nuages, mêmes exif que la photo de dessus. Traitement "ton clair ton foncé" pour donner plus de punch Prochaine étape, pour 2010, le choix entre les derniers vols du Shuttle, Soyouz en Guyane ou Ariane 5 encore une fois mais de nuit.
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Photos Didier Capdevila, Olivier Berger et Buran. Novembre 2009