LA STATION I.S.S

DEVELOPPEMENT DE L'ATV

2003

23 janvier, EADS présente l'état d'avancement des travaux du module de vol ATV "Jules Verne" aux Mureaux à Paris. Le premier lancement à l'aide d'une Ariane-5 est fixé au 27 septembre 2004. Il sera suivi de huit autres, à la cadence d'un vol tous les quinze mois environ. L'ATV pourra rester amarré jusqu'à six mois au module russe Zvezda. Puis, il embarquera six tonnes de déchets qui brûleront dans l'atmosphère lors de la désintégration du véhicule, au-dessus de l'océan Pacifique. Quant à l'actuelle ISS, son assemblage devrait être parachevé en 2006. A partir de cette date, la Station devrait accueillir un équipage permanent de six membres, contre trois aujourd'hui.

Pour les cas d'évacuation d'urgence, deux vaisseaux russes Soyouz triplaces devront toujours être disponibles. A cette fin, une dizaine de Soyouz supplémentaires devaient être achetés par les Américains, sauf que cette transaction leur est interdite par la loi dite sur la non-prolifération d'armes en Iran (Iran Non-Proliferation Act). La NASA ne peut faire à Rosaviacosmos aucun "paiement extraordinaire" en liaison avec l'ISS, à moins que le président ne juge que la Russie n'a effectué l'année précédente aucun transfert pouvant engendrer des risques de prolifération d'armes. Or, Moscou construit une centrale électronucléaire en Iran et Washington craint que Téhéran n'utilise l'expérience ainsi acquise à des fins militaires. Conséquence, "le bébé a été passé aux Européens", dixit Jörg Feustel-Büechl, directeur des vols habités à l'ESA, en marge de la présentation de l'ATV. Pour résoudre ce véritable casse-tête politique, l'Agence est à la recherche de "partenaires internationaux" qui pourraient l'aider à le résoudre "sous forme d'échanges de marchandises, sans transfert de fonds".

Fin janvier, 90% des éléments de l'ATV de vol Jules Verne sont construits. Chez EADS aux Mureaux la maquette électrique ETM Electrical Test Model reprenant l'avionique et l'électronique des modèles de vol a démarré ses essais en décembre dernier dans l'unité de simulation fonctionnelle ISF où 20 ingénieurs testeront l'ensemble du "cerveau" de l'ATV. Cette unité de test sera disponible durant les 8 ans que dureront les lancement pour d'éventuelles améliorations. En mars, l'ISF accueillera le système de jonction russe à ISS et celui de remplissage en carburant. Concernant le modèle de vol, à Turin, le module ICC prend forme. En juin, le système russe construit par RSC Energia sera intégré au ICC. Puis en octobre après contrôle, le ICC sera livré à Astrium à Brême. 
Chez Astrium Toulouse, la baie de propulsion sera livré en août à Brême. Septembre serra l'assemblage des deux parties pour créer le sous système Spacecraft Segment qui comprend la propulsion, l'énergie électrique, les ordinateur et l'avionique. L'assemblage du module ICC et du sous système constituera "Jules Verne" en novembre. En janvier 2004, le modèle de vol sera envoyé à Noordwijk au ESTEC pour des tests acoustiques et sa qualification avant d'être acheminé à Kourou.

Le 17 avril, Jörg Feustel-Büechl, Directeur des vols habités à l’ESA et Yannick d’Escatha, Président du CNES signent un contrat pour le développement et les opérations du centre de contrôle de l’ATV au Centre spatial de Toulouse. Une contribution importante qui va de paire avec la desserte de l'ISS par le cargo de l'espace.
Le Centre de Contrôle sera essentiellement chargé de surveiller et contrôler l' ATV. Selon les termes du contrat, le CNES sera responsable du développement de ce Centre de Contrôle puis devra coordonner et conduire l'ensemble des opérations de l'ATV pour le compte de l'ESA. Après le lancement, l'ATV se séparera d'Ariane. Le Centre de Contrôle prendra alors le relais et guidera l'ATV qui utilisera son propre système de navigation pendant son vol de trois jours. Le véhicule utilisera ensuite ses capteurs optiques pour s'arrimer automatiquement à la Station Spatiale, sous l'étroite surveillance du Centre de Contrôle et de l'équipage ; il deviendra ainsi un élément à part entière de la Station Spatiale pour une durée maximale de six mois.

Le CC de l'ATV à Toulouse dans le bâtiment Fermat

Juin, après trois mois et demi de travail, l'ATV termine avec succès sa revue critique de conception CDR (Critical Design Rewiev) pendant laquelle 140 experts internationaux de l'espace (40 ingénieurs de RSC Energia, 25 de la NASA, 50 de l'ESA, CNES et Arianespace) ont passé en revue l'ensemble des 55000 pages de documentations affirmant leur totale confiance dans le système. Cette CDR est un pas très important dans le développement de l'ATV et pour l'avenir de la station ISS. La voie est maintenant ouverte pour commencer l'assemblage du premier modèle de vol "Jules Verne".

Le premier modèle de vol de l'ATV, le Jules Verne, est en fait un "protoflight", à la fois modèle d'essai et modèle de vol. L'assemblage final du cargo spatial est prévu en septembre 2003 et doit se dérouler sur environ 3 mois et son intégration doit être terminée début 2004. Après des essais mécaniques, électriques et fonctionnels à l'ESTEC, il sera envoyé, en deux parties, à Kourou où il sera réintégré puis monté sur Ariane 5. A cette effet de nouvelles installations sont prévues au CSG:
_ La nouvelle zone de stockage des ergols hypergoliques (qui devrait être opérationnelle début 2004) ; 
_ Le Dock Ariane 4 va être abaissé à la hauteur de 21 mètres pour faire office de "frigo" (salle climatisée) pour stocker le matériel ATV entre deux campagnes de lancement, évitant les aller-retour avec la Guyane. 
_ Le bâtiment S5 va être équipé de plusieurs systèmes de réception satellite, compatible GPS et TDRSS.

La première mission est programmée pour septembre 2004. Elle a pour objectif principal de démontrer la sûreté des opérations de l'ATV aux abords de la Station spatiale, avant ses phases d'approche et d'arrimage. Pour ce faire, il devra réaliser un certain nombre de manœuvres sous le commandement, soit du centre de contrôle ATV à Terre, soit de l'équipage de la Station : retrait, manœuvre d'évitement, etc. L'ATV remplira ensuite sa mission, de façon 'normale', amarrage, reboost de l'ISS, support au contrôle d'altitude, apport d'ergols, de fret d'eau et de gaz. La mission Jules Verne, si elle est fondée sur un scénario classique, subira toutefois quelques adaptations pour réaliser toutes ces démonstrations en vol. Un scénario sur cinq jours a été défini et accepté par les partenaires de la Station. Il se terminera par un amarrage à l'ISS au bout du cinquième jour. Jules Verne restera alors arrimé à l'ISS pendant 6 mois avant d'être détruit lors de sa rentrée atmosphérique.

C'est une Ariane 5 équipée d'un étage à ergols stockable rallumable, qui lancera le véhicule de transfert automatique dès le second vol ATV, si ce lanceur est opérationnel à cette date. 
Trois minutes environ après le décollage, la coiffe est éjectée, puis sept minutes plus tard, l'étage principal cryotechnique (EPC) est séparé de l'EPS et de l'ATV. Par deux phases de poussée, séparées par une phase balistique de 45 minutes, l'EPS place l'ATV sur une orbite quasi-circulaire, à 300 km d'altitude. Environ 70 mn après le décollage, l'ATV, dont les systèmes bord ont été activés, est séparé de l'EPS grâce à un système de sangle. Dès sa séparation de l'étage supérieur d'Ariane 5, l'ATV s'oriente vers le Soleil et déploie ses panneaux solaires et son antenne de communication avec la Station. Les opérations jusqu'à l'amarrage peuvent durer 3 jours.