LA GENESE DE LA DISSUASION
FRANCAISE
A la fin de la seconde guerre
mondiale, comme les américains et les soviétiques, les Français
accueillent des ingénieurs et techniciens allemands ayant travaillé sur
des fusées. A partir de 1946, le Laboratoire de recherches balistiques
et aérodynamique LRBA de Vernon dans l'Eure étudie des engins dérivés de la fusée V2 dont
la fusée sonde Véronique pour l'étude de la haute atmosphère. En
1949, ce programme permet d'expérimenter des moteurs fusées employant
différents carburant solide et liquide et de développer des systèmes
de guidage et de pilotage.
1957, les soviétiques mettent sur orbite le premier satellite artificiel,
Spoutnik 1. Un an plus tard, en France est lancé le programme Casseur,
un missile balistique sol-sol pour l'armée de terre. Le développement
est assuré par Sud Aviation et la motorisation par Nord Aviation.
L'arrivée au pouvoir du Général de Gaule précipite les choses. En
septembre 1959 est crée la SEREB, regroupant Nord et Sud
Aviation, Matra, SEPR et Sagem. Elle commence aussitôt l'étude d'un missile
balistique de base EBB. A partir de 1961, la SEREB développe les VE,
véhicule d'essai plus connu sous le nom de "pierres
précieuses", Saphir, Agate, Topaze, Emeraude et Rubis. Lancés
du CIES d'Hammaguir en Algérie, les pierres précieuses permettent de
définir nos besoins en matière de fusées, de choisir entre la propulsion solide et liquide, de définir le pilotage
d'un lanceur à deux étages, d'étudier la phase de rentrée d'une ogive
et de maitriser le guidage inertiel pour une précision
absolue.
En 1958, suite aux accords de Nassau 6
signés entre la Grande Bretagne et les USA, le général de Gaule,
nouvellement élu décide de développer à partir de l'industrie
nationale une "force de frappe" purement française. Par cet
accord les Britanniques viennent de tuer leur industrie spatiale, en
même temps qu’ils subordonnent ses forces d’attaque à celles des
U.S.A. De Gaule évince dans le même temps les forces américaines du
sol français et abandonne dans l'été 1960 toute coopération avec
l'OTAN en matière de missiles stratégiques.
Le programme de force de frappe est
présenté en novembre 1959. Les efforts sont rapidement récompensés
avec l'explosion de la première bombe atomique française
"Gerboise bleu" le 13 février 1960 à Reggane dans le Sahara
Algérien. La Force
Nucléaire Stratégique FNS est clairement définie. Le 23 février 1962, le
conseil de défense arrête la décision de construire un missile
balistique sol-sol SSBS tiré d'un silo et un missile mer-sol MSBS tiré
depuis un sous marin. Ces deux types de missiles se positionne entre les
Mirage IV porteur de bombes atomiques et les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins
(SNLE).
Lé réacteur nucléaire des sous marins sera construit à Cadarache,
dans l'usine du CEA près de Manosque.
La France n'était pas seule à s'engager dans l'armement avec des
missiles balistiques. Les USA avaient également élaborés une
stratégie de défense basée sur les SSBS.
Au début des années 1960, seules
deux familles de missiles intercontinentaux sont logées en silos,
les Atlas et les Titan. Les Atlas étaient avec quelques Titan 1 les
premiers en alerte le matin du 24 octobre 1961, lorsque le
Président Kennedy a lancé un ultimatum à l'Union soviétique afin
d'empêcher le déploiement de missiles à Cuba.
Deux types de bases avaient été
construits pour abriter ces missiles. Les premières générations
d'Atlas D étaient érigées comme à Cap Canaveral sur un pad de
tir. pour la génération suivante, les Atlas E, le missile était
stocké dans un silo à l'horizontale dans un bunker en béton,
juste au-dessous du niveau du sol. Le "couvercle" du silo,
d'environ 600 tonnes, s'ouvrait pour permettre au missile d'être
mis sur pied, avitaillé et lancé. Avec des murs, des sols et des
plafonds en béton armé massif d'environ 60 cm d'épaisseur, ce
type de site était destiné à résister à une bombe
thermonucléaire d'une mégatonne dans un rayon d'au moins 2 km. Un
des inconvénient majeur du système de silo horizontal était la
très grande vulnérabilité du missile qui pouvait être attaqué
à tout moment pendant sa préparation.
La base des Atlas E est partagée en
deux bâtiments souterrains principaux, il s'agit du bâtiment de
service et du bâtiment des opérations de lancement. Des tunnels
avec parois en acier relient les deux bâtiments et permettent d'y
accéder par l'intermédiaire d'une entrée qui ressemble beaucoup
à une chambre forte, sauf qu'elle est dotée de deux portes
successives, séparées par un petit vestibule. Ce type de
construction comportait un sas qui permettait aux troupes d'aller et
de venir sans risquer de se laisser surprendre par une attaque.
Le bâtiment de service contenait l'Atlas
ainsi que son équipement de ravitaillement. Sa surface totale représente
environ 1000 mètres carrés divisés en plusieurs
compartiments. Il mesure environ 36 mètres de long sur 6 mètres
de large et 6 mètres de hauteur. Le "plafond" est
constitué par la partie inférieure du couvercle du silo, qui
pouvait être retirée sur les côtés pour ouvrir la chambre sur le
ciel.
Le second bâtiment souterrain, le bâtiment des opérations de
lancement, servait à héberger les troupes et les commandes
permettant de ravitailler, d'armer et de lancer le missile. Il
contenait également deux générateurs diesel de 250 kW
fournissant l'électricité nécessaire pour le site : il n'y
avait aucune liaison avec les commodités extérieures. La
superficie totale de ce bâtiment est d'environ 500 mètres
carrés.
27 bases ont été construites entre 1958 et 1961.
Elles seront opérationnelles jusqu'en 1966. Après 1965, de nombreux
silos seront détruits pour se conformer aux traités internationaux.
_ 5 silos Atlas E dans l'état de Washington,
_ 9 silos Atlas E dans le Kansas,
_ 7 silos Atlas E dans le Wyoming,
_ 1 silo Atlas E dans le Nebraska
_ 1 silo Atlas E dans le Colorado.
Avec la venue des Atlas F, le missile
était stocké à la verticale dans un véritable silo, un cylindre
vertical profondément enterré dans le sol. Le missile était
avitaillé en toute sécurité dans le silo et était dressé dans
sa position de tir à travers les portes situées au sommet du silo,
quelques minutes seulement avant le tir. Ce type de site était
conçu pour résister à une bombe d'une mégatonne dans un rayon
d'environ 500 mètres. Le principal avantage des silos enterré
permettait de préparer le missile sous terre sans craindre une
attaque surprise..
La zone de lancement pour les Atlas F est composée du
silo proprement dit relié par un tunnel au centre de lancement LCC.
5 personnes composent l'équipe de lancement. C'est la structure la
plus solide construite par l'homme. 72 ont été construites gérés par
6 Atlas F SMS wings.
11 silos
Atlas F dans l'Oklahoma
_ 10 silos Atlas F dans le Texas
_ 11 silos Atlas F dans le Nebraska
_ 1 silo Atlas F dans le Vermont
_ 8 Atlas F dans l'état de New York
_ 9 silos Atlas F dans le Kansas
_ 8 silos Atlas F dans le Nouveau Mexique |
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En 1965, la famille Atlas est
retirée du service, l'emploi de propergols hautement énergétique
avait provoqué des accidents dans des silos. Ce sont les Titans et
les Minutemam qui les ont remplacé. Les missiles récupérés ont
servit pour lancer des satellites depuis Cap canaveral et Vandenberg.
Le dernier missile Atlas-E, construit en 1961, a été lancé de la
base militaire aérienne californienne de Vandenburg, le 24 mars
1995, afin de placer un satellite météorologique sur orbite.
En parallèle au missile Atlas est
développé le Titan 1, un missile à deux étages à propergols
liquide. Installé en silo comme l'Atlas F, chaque zone de lancement pour Titan 1
permettait de gérer trois fusées. Le premier missile est installé
en silo en février 1962 à Beale AFB - Lincoln Complex 4A.. 90
seront déployés jusqu'en 1963-64. Début 1965, les bases sont mis
en fin d'alerte. 163 Titan 1 ont été construits, 6 essayés en
vol, 4 ont explosé en silo et deux au banc. Les 90 missiles
retirés des silos ne seront pas reconvertit en lanceur de
satellite, 20 seront donnés à des musées, le reste sera détruit.
En 1985, un second étage de titan 1 sera mis au banc pour être
détruit par un laser sur la base de White Sands.
1 silo Titan
1 en Californie
_ 3 silos Titan 1 dans l'état de Washington
_ 2 silos Titan 1 dans l'Idaho
_ 1 silo Titan 1 dans le Colorado
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Le Titan 2 à propergols stockables
lui succède de 1962 à 1985. 54 missiles seront construits et
resteront en opération pendant 22 ans.
En 1987, les silos sont détruits,
seul subsiste un site reconvertit en musée national près de Tucson
en Arizona.
_ 18 à
Davis-Monthan Air Force Base (390th Strategic Missile Wing),
Tucson, Arizona;
_ 18 à Little Rock Air Force Base (308th Strategic Missile
Wing), Jacksonville, Arkansas;
_ 18 à McConnell Air Force Base (381st Strategic Missile
Wing), Wichita, Kansas. |
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Quatrième missile de la famille,
mais à propergol solide, le Minuteman avec ses trois étages.
déployés en décembre 1962, il est remplacé par le Minuteman 2 en
1966 et partiellement par le Minuteman 3 à têtes multiples en
1977. Environ 1250 missiles ont été construit et 1000 déployés
à travers 5 états d'Amérique, Le Montana, (200), le Dakota du
nord (150), le Dakota du Sud (150), Le Wyoming (200), le Nebraska
(150) et le Missouri (150).
Dernier missiles Sol-Sol américain,
le MX Peacekeeper, doté de trois étages et porteur de 10 têtes
nucléaires. Son développement commence en 1974 afin de se
"protéger" de la vulnérabilité des Minuteman en silos.
114 exemplaires au lieu des 173 prévus seront finalement construits
et 50 déployés dans les silos des Minuteman à Warren Air Force
Base, Wyoming. Avec le fin de la guerre froide, les USA ont décidé
de démanteler les Peacekeeper dès 2003.
Les missiles ICBM Minuteman et
Peacekeeper actuels sont des fusées à combustible solide pouvant
être lancées directement des tubes de silos, en l'espace de
quelques secondes.
Du coté soviétique, le premier
missile en silo apparait au milieu des années 1960 avec le SS13
Savage à trois étages à propergols solides. 60 missiles sont
déployés jusqu'en 1968. Suivent le SS 17 et 19 à propergols
liquides. Développé en parallèle, ces deux missiles sont
déployés en 1975-77 (100 SS 17 et 200 SS 19). Dernier missile en
date, le SS 18 qui est le plus gros missile ICBM du monde. Déployé
dès 1974 avec 308 unités, il est propulsé par des propergols
liquides et utilise la technique du lancement à froid pour
permettre de réutilisé le silo.
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Le système SSBS est réalisé
dans le cadre de l’organisation Athéna, dotée d'un comité directeur
présidé par le Délégué ministériel pour l'armement, d'un groupe opérationnel
présidé par un général de l'armée de l'Air et d'un groupe technique
présidé par un ingénieur de la Direction technique des engins,
directeur du programme Athéna. De nombreux sous-groupes, créés à
l'initiative de ces deux groupes, complètent l'organisation. La SEREB
assure la maîtrise d'œuvre d'ensemble du système.
Le premier système SSBS
– dit S1 puis S2 – a pour objectif une mise en service à la fin de
1968, ce qui impose de retenir pour les techniques clés les solutions
qualifiées ou en cours de qualification sur le programme EBB :
- propulseurs à enveloppe métallique, bloc de propergol en isolane et
tuyères rotatives autour d’un axe ;
- calculateur de guidage à mémoire à tambour ;
-centrale inertielle à cardans ;
-corps de rentrée à bouclier thermique ablatif.
Toutefois, malgré des résultats très satisfaisants obtenus sur les
propulseurs à poudre du programme EBB, le passage à des dimensions
beaucoup plus importantes (d’un diamètre de 800 mm à 1500 mm) est
difficile dans le domaine des tuyères et, surtout, du chargement. Les
premiers missiles opérationnels ont du d’ailleurs être recyclés pour
en fiabiliser les chargements.
Pour des raisons de faisabilité assurée, la charge est une bombe à
fission de 150 kT.
En février 1962, on définit un missile à deux
étages à poudre de 16 et 10 tonnes (P16 et P10), séparé en vol par
pressurisation et guidé par inertie de manière à respecter l'objectif
de portée à plus de 3000 km. Le S1 devient le S2, 14,8 m de haut pour
une masse de 32
tonnes.
Avril 1962, premiers
essais des étages dans les installations du CAEPE près de Bordeaux et en
1965, premier tir du S112 (12,6 m de long, 1,5 m de diamètre et 25
tonnes) à Hammaguir en Algérie, le 23 octobre. Il sera suivit d'un
second tir le 3 novembre.
Les
essais de qualification en vol sont progressifs:
tirs
en surface puis en silos, mono-étages simplement pilotés, puis bi-étages,
essais de la version S112 avec un étage de 10 tonnes (4 tirs en
1966-67), S01 équipé de deux étages de 10 tonnes (8 tirs en 1967-68) et
S02, le prototype du S2 (7 tirs en 1968-71), qualification en vol du vecteur, puis
des équipements de la charge (hors matériaux nucléaires
naturellement). Le taux d’échec en vol est élevé à cause de la
propulsion principalement. Sur un total de 27 tirs de développement
dont 8 du S2, il
y a 14 succès et 13 échecs. De
ces études et essais sortira le premier lanceur spatial français
Diamant, dérivée des Vesta qui met sur orbite le premier satellite
français Asterix le 26 novembre 1965.
Tous ces essais ont lieu dans un premier temps CIEES d'Hammaguir en
Algérie (deux tirs), puis au CEL de Biscarrosse après le départ des
militaires de l'Algérie. La base de Kourou en Guyane ne servant que
pour les lancements civils.
Dotés d’un second étage inerte, les deux premiers essais en vol
du missile S112 commencent depuis le pas de tir algérien d’Hammaguir
en octobre et novembre 1965, dans le but de qualifier le propulseur
solide de 10 tonnes de poussée à quatre tuyères. Les essais se
poursuivent en 1966 au CEL des Landes. Cinq tirs du missile S112 sont
effectués depuis un silo en béton entre février 1966 et mars 1967. En
juillet 1967 commencent les essais du missile S01 bi-étages comportant
deux propulseurs de 10 tonnes à poudre, six tirs validant le
lanceur, deux la charge atomique. Doté d’un propulseur à poudre de
16 tonnes, le missile S02 effectue ses essais au CEL, avec douze tirs,
de 1968 à 1973.
Sur un total de 27 tirs
de développement, il y eut 14 succès et 13 échecs. Au cours de la vie
opérationnelle du S2, il est procédé à sept tirs d'exercice, dont
cinq furent des succès, toutes les versions jusqu'au dernier tir de S2.
Le missile S2 dans les
ateliers de l'Aérospatiale et en vol à Biscarrosse.
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