ARIANE 1, NAISSANCE D' UNE FUSEE
Dès
1970 le développement spectaculaire des applications spatiales contraint
l’Europe à prendre conscience de l’importance politique et économique que
constituait l’utilisation de l’espace. Tout laisse présumer que la décennie
1980-1990 verra la mise en place de systèmes spatiaux à des fins
commerciales dans le domaine des télécommunications, de la télévision
directe, de la météorologie ou de l’observation de la Terre. 1973 Janvier, Europa 3 B est mort, vive le L3S. Le projet est affiné par le CNES et les industriels Français, la SNIAS (ancien LRBA), la SEP (crée en 1969 associant SEPR et Snecma entre autre), Matra et Air Liquide. Ce lanceur Comporte trois étages à ergols liquides; le troisième étage utilise hydrogène et oxygène liquide comme le deuxième étage d'Europa III B. Mais il est plus petit que ce dernier et son moteur est techno logiquement moins ambitieux, ce qui accroît les chances de succès du programme. L' étage L30 devient un L35 avec un diamètre réduit à 2,6 m tandis que le H6 voit le sien augmenté à 2,6 m et sa hauteur réduite à 4,5 m. Son moteur sera le HM7 mono tuyère en place du HM6 quadri-tuyère. La capacité en orbite est celle d'Europa 3B, soit une charge de 750 kg en GEO pour 1980. Le prix annoncé serait de 61 millions FF(prix 1972 HT) auquel s'ajouteraient les frais de lancement, soit l'équivalent de l'Atlas Centaur US. Si la France pense financer le projet à 60%, l'Allemagne ne donnera pas plus de 20%. Le deal est que chaque membres de l'ELDO participe pour beaucoup à son propre projet en échange d'une petite participation au projet de l'autre. Ainsi l'Allemagne participera au module de sortie US à hauteur de 60% et à 20% pour le L3S. Le L3S coutera 2 210 millions FF (prix 1973 HT) avec 20ù de marge pour aléas techniques. Europa aurait couté 3 520 millions, aléas compris. Le L3S est un lanceur raisonnable, bâti avec des techniques éprouvées et utilisant au maximum les investissements existants. Par exemple, le H20 d'Europa était estimé à 1 185 millions FF alors que le H6 du L3S ne couterait que 540 millions FF. Pour la France, le L3S est estimé à 3000 millions FF, tout compris. Le L3S version décembre 1972 Février, le CNES officialise la configuration L150+L35+H6 du L3S. L'étage L35, voit son diamètre réduit de 2,8 à 2,6 m, passant de 7,2 à 6,9 m de hauteur avec un réservoir à fond commun pour gagner en volume. Le H8 mesure aussi 2,6 m de diamètre pour 4,5 m de hauteur (7 mètres initialement). Sa propulsion est assurée par le moteur HM 6. La case à équipement assure le passage au 3,2 m de la coiffe qui offrira 7 m d'utile en hauteur. Le L3S, qui a pour mission de satelliser 700 à 800 kilogrammes en orbite géostationnaire, doit être opérationnel en 1980 et être d'un coût d'utilisation comparable aux lanceurs américains de taille analogue. Il est conçu pour utiliser au mieux les technologies déjà développées et sûres. Cette contrainte fige ses caractéristiques, les travaux de l'Air Liquide exécutés de 1962 à 1970 sur des réservoirs cryotechniques limitent à 2,60 m le diamètre du troisième étage. Les travaux de la SEP sur les moteurs cryotechniques de 4 à 7 tonnes de poussée HM4 et HM7 et par MBB sur les chambres de combustion conduisent au choix du moteur HM7 pour la propulsion de ce troisième étage. Celui-ci est, de ce fait, limité à 10 tonnes d'ergols au maximum ce qui implique, pour obtenir les performances voulues, l'utilisation de deux étages inférieurs à ergols classiques alors qu'Europa III B avec son gros étage cryotechnique de 20 tonnes se contentait d'un seul étage inférieur à ergols classiques. Les étages à ergols classiques étant désignés L et à ergols cryotechniques H avec un chiffre désignant la masse d'ergols en tonnes, on étudie plusieurs combinaisons dont L140/L33/H8. Cette dernière solution est finalement retenue. Le L140 est une version allégée du L150, premier étage d'Europa III B, utilisant les mêmes ergols, peroxyde d'azote (N204) comme oxydant et dimethyl hydrazine asymétrique (désigné UDMH) comme carburant et les quatre mêmes moteurs Viking 2 de 60 tonnes de poussée au sol. Le deuxième étage est propulsé par une variante à long divergent du moteur Viking 2, adapté au fonctionnement dans le vide, le Viking 4 qui développe 71 ,3 tonnes de poussée dans le vide. L'amélioration des moteurs dans la suite du programme portera la poussée totale du premier étage à 245 tonnes au sol ou 277 tonnes dans le vide et celle du deuxième étage à 72 tonnes. Le troisième étage cryotechnique est propulsé par le moteur HM7 de 6 tonnes de poussée. Au printemps, à la veille de l' ouverture de la conférence de Bruxelles, de nombreux problèmes sont à régler: préparation de la convention créant la nouvelle agence spatiale, la dimension européenne du programme L3S, les "surenchères" des Anglais, les pressions Américaines en vue d' une coopération avec le "Space Shuttle" (intéressant l' Italie et l' Allemagne). Le 30 avril, le programme Europa 2 est définitivement mis aux oubliettes.
Le 10 mai, le projet L3S est présenté à l’ industrie
Européenne à Paris. Le CNES en est le gestionnaire technique, l' Aerospatiale
le maître d' oeuvre (division des Mureaux Paris). Le CNES a déjà passé 4
contrats avec l' Aerospatiale (structure premier et second étages,
inter-étages et coiffe, intégration des étages), Air Liquide (structure
troisième étage), SEP (propulsion) et MATRA (case à équipement et banc d
contrôle au sol). La France s' engage sur 60 % du programme, le reste étant à
trouver d' ici deux mois auprès des autres partenaires. Le L3S devra être
opérationnel pour 1980 et la mise en orbite du satellite de télécommunication
européen et être comparable en coût aux Atlas Centaur américain. Il est décidé d’ utiliser les techniques déjà développées
et sures. Au lieu d' un lanceur deux étages équipés d' un gros moteur
cryogénique, le L3S en possède trois et seul le dernier est cryogénique ce
qui limite les risques. Cet étage aura un diamètre de 2,6 m et le moteur HM7 de
la SEP assurera la propulsion. Il contiendra 10 tonnes de carburant. Les deux étages
inférieurs utiliseront des carburants classique avec des moteurs Viking. Plusieurs formules sont proposées : L’ étage L140 est plus petit que le L150 d’ Europa
3B et il utilise les mêmes ergols, UDMH et N2O4, la propulsion étant assurée
par 4 moteurs Viking de 60 tonnes de poussée. Du coté des moyens d'
essais, de nouveaux banc d' essais seront construit à Vernon. Les banc actuels
PF 2 et 4 seront utilisés pour les moteurs Viking seul et le second étage avec
réservoirs "lourds". Un banc PF20 sera construit pour le premier
étage ainsi qu' un autre pour les essais en configuration de vol réel. Pour le
moteur cryogénique, 4 bancs seront aussi construit à Vernon en plus de celui
d' Allemagne (Ottobrunn), un pour les essais de turbo pompe PF41, un pour moteur
complet, un pour les étage avec réservoirs lourds PF42 et un pour l' étage en
configuration de vol PF43. L' intégration du lanceur sera réalisé aux Mureaux
ou l' Aerospatiale construira un bâtiment pour l' intégration à l' équerre (premier étage horizontal, second et troisième vertical et les essais
dynamiques complet.) Juin, une maquette du L3S est présentée au salon du Bourget, Paris ainsi qu'un moteur Viking 2 et une maquette de la baie du premier étage du L3S. Sur les 8 pays membres de l'ELDO, seuls la Belgique, l'Italie, l'Espagne, les pays Bas, la Suède, la Suisse et le Danemark semblent intéressés au projet français. L'Allemagne et la Grande Bretagne y sont hostiles. Les allemand considère qu'un lanceur européen ne se justifie pas compte tenu du nombre restreint de lancements que les américains seraient susceptibles de refuser. Pour la France, l'indépendance européenne passe par la possession d'un lanceur capable de placer en orbite la cinquantaine de satellites d'application en orbite GEO de 400 à 700 kg que l'Europe va construire pendant la prochaine décennie.
Moteur Viking 2 au Bourget
La baie "Drakkar" avec 4 moteurs Viking 2 exposé au salon du Bourget par la SEP Juillet, si l'ELDO est morte, l'ESRO essai tant bien que mal de survivre: depuis sa création en 1962, l'organisation a lancé 8 satellites scientifiques, dont un échec avec des lanceurs US. Le plus gros pesait 500 kg, TD-1 A. A partir de 1975, l'ESRO aura à lancer 5 satellites scientifiques et 3 d'applications. Des négociations sont en cours avec les américains pour acheter des Thor Delta afin de lancer COS B, GEOS, Meteosat, Aerosat et OTS, des satellites dits "expérimentaux" qui ne rentreront pas en concurrence avec les USA. Le 12 juillet, la Conférence spatiale européenne CSE se réunit pour confirmer les décisions de principe de décembre 1972. Coup de théâtre moins d'une heure après son ouverture, la réunion est ajournée. Les délégués de l'Italie, des Pays-Bas et de la Suède ne sont pas mandatés pour prendre immédiatement des engagements. L'inquiétude est grande, en additionnant le pourcentage de chaque membre, les 100ù ne sont jamais atteint. La France est d' accord pour financer le L3S à concurrence de 60% et assumer le coût des risques supplémentaires. elle est aussi d' accord pour le Spacelab à condition d' obtenir un accord sur le lanceur. Les Britanniques acceptent de participer modestement au Spacelab, mais n' ont aucun intérêt pour le L3S. L' Allemagne enfin se dit prêt à participer au L3S à la hauteur d' un certain pourcentage exprimé en Mark et non en pourcentage. De plus, elle lie sa participation au lanceur à celle du Spacelab. La Belgique s' engage pour 4% dans le Spacelab et le L3S, l' Espagne prend 2%, les Danois donnent leur accord pour 0,5% tandis que la Suède, la Norvège et les Pays Bas ne se décident pas . La réunion est ajournée et les décisions sont reportées au 31 juillet. Sur les conseils de M Charbonnel, Charles
Hann, ministre Belge de la recherche (1973 à 76) qui préside la réunion
entreprends un tour d' Europe afin de convaincre les responsables scientifiques,
mais sans réel succès. Réunion de la CSE le 31 juillet qui a aboutit au deal arraché par Charles Hann.
Les 3 grands, France, Allemagne et Royaume Uni, avec la Belgique, les Pays Bas, l'Espagne, la Suisse et le Danemark viennent de s'engager dans des programmes d'une ampleur sans précédent en Europe pour un montant de 4500 millions FF jusqu'en 1980: 2 472 millions pour le lanceur L3S, 1 710 millions pour le Spacelab et 275 millions FF pour le satellite Marots. Le 1er août, Bruxelles, le programme L3S est déclaré projet spécial CERS-ESRO, chaque pays étant libre d’ y participer ou pas. En ami, la France propose de prendre à sa charge 60% du financement du programme, celui devant couté 2060 000 000 F (1973). Une marge de 20% pour aléas porte le coût du programme à 2472 000 000 reportés sur 7 ans. Pour la France, la part représente 25% du budget du CNES, mais quatre fois moins que ce que dépense un Américains pour l' espace.
Participations des états européen à l'issue des accords du 20-21 septembre. Si l'addition des pourcentages est bon pour Spacelab et Marots, il n'est pas encore finalisé pour le L3S Octobre, le L III S trouve un nom : il s'appellera Ariane. Pourquoi Ariane? L'histoire raconte que des noms tels que Vega ou Phoenix (celui qui renaît de ses cendres, allusion à peine voilée aux problèmes des lanceurs européens précédents), sont sortis d'un concours interne à l'Agence spatiale européenne. Le choix final est alors proposé au ministre de l'industrie et du développement scientifique, M. Charbonnel. Le ministre choisit "Ariane ", nom qui ne figure pas dans la liste! Pourquoi? Parce que n'ayant que deux fils, M. Charbonnel avait toujours souhaité une fille qu'il aurait appelée Ariane ! Une autre légende affirme que M Charbonel pensait au fils d' Ariane, qui dans la mythologie grecque permit à Thesée de se retrouver dans le labyrinthe après avoir triomphé du minotaure. À l'époque Ariane est toujours dans l'enfance. Presque tout reste à faire et il ne faut pas recommencer Europa... Des noms sont proposés pour le lanceur L3S. Comme le 1er août est la journée nationale de la Suisse, 2 suggestions sont faites: Edelweis et Guillaume Tell. D'autres sont issues de la mythologie Grecque ou Romaine, comme Patience, Prometheus, Penelope, Phoenix et Orion. Ci dessus, des noms écrits au bas d'un papier par Peter Creola, le délégué Suisse de l'ESRO (Photo ESA-SP 1265).
Le 6 décembre la responsabilité du projet dénommé est confié au CNES par l’
ESRO, le protocole d’ accord étant définitivement
signé le 7 février 1974. Dans l’ arrangement final, le 28 décembre la France
accepte de couvrir les surcoûts du programme jusqu’ à 35% des 2472 millions. L' ORGANISATION INDUSTRIELLE ET FINANCIERE 1974 Janvier, début de la construction du SIL le Site d' Intégration des lanceurs aux Mureaux près de paris dans les locaux de l' Aerospatiale. Dans ce bâtiment, les lanceurs seront assemblés en deux parties, le premier étage et l' ensemble second troisième car sa hauteur ne permet pas de dresser le lanceur complet comme sur le pad. D' une superficie de 4000 m2, le SIL est divisé en 4 zones de travail avec une nef centrale de 33 m de hauteur équipée d' un pont roulant.
Le 7 février, le protocole d'accord de décembre 1973 est définitivement signé, la responsabilité du programme
a été confiée au CNES par l'ESRO. En ce
qui concerne la répartition financière, la France a dû accepter de payer plus
que les 60 % qu'elle proposait au printemps 1973. A quoi il faut ajouter pour certains de ces pays d'autres investissements dans le programme spatial européen. A côté du lanceur, ne l'oublions pas, il y a aussi le projet Spacelab pour lequel se mobilisent l'Allemagne et l'italie, et le projet Marots de télécommunications maritimes qui retient l'attention du Royaume-Uni. L'ensemble du programme L III S "Ariane", lui, doit coûter 2060 millions de francs aux conditions économiques de janvier 1973. Une marge de 20 % pour aléas porte le total à 2 472 millions répartis sur 7 ans. Pour la France, le financement supporté est équivalent à la construction de 20 à 40 kilomètres d'autoroute par an et représente 25 % du budget spatial français. Dans l'arrangement final qui entre en vigueur le 28 décembre 1973, le gouvernement français s'engage à couvrir les surcoûts éventuels du programme jusqu'à concurrence de 35 % au-dessus de 2 060 millions. Au-delà de ce plafond, il est convenu que les états participants se concerteront sur la suite à donner au programme. chacun étant libéré de ses engagements. La contribution de chaque pays est exprimée
en monnaie nationale et est réévaluée en fonction de l'inflation dans ce pays
(qui par ailleurs reçoit un montant de travaux au moins égal à 80 % de sa
contribution), mettant ainsi le programme à l'abri de l'érosion monétaire et
des modifications de parité. Mars, l'industrie française est en marche pour fabriquer Ariane. La définition technique est acquise, les principaux contractants choisis, l'organisation industrielle est en place et le financement prend de l'ampleur. Chez les industriels, les dossiers techniques, l'outillage et les machines de fabrication ainsi que les premiers éléments du futur lanceur (couronnes, viroles, maquettes de réservoirs, turbopompes, moteurs) sont en route. Ariane sera essentiellement construite en alliage d'aluminium A Z5G et A U4G1, les réservoirs du L140 seront en acier, 15 CDV6 Vascojet, comme l'étage L17 de Diamant. Ariane sera lancé du CSG, depuis les anciennes installations de tir d'Europa 2, réutilisée et modifiées en grandes parties: CDL, pad de tir, rampes d'accès, tour, mat ombilical, hall d'assemblage, stockage d'ergols, usine de fabrication azote et bureau. Pour le transport des étages, le L140 prendra la mer, le L33 et le H8, l'air. Les moyens de poursuite et de télémesure du lanceur en Guyane seront renforcés, outre les 2 radars "Bretagne" et 2 radars "Adour" de Kourou, il faudra disposer des informations du radar du champ de tir brésilien de Natal et ceux de la NASA sur l'île de l'ascension. La station de Fortazela, au Brésil sera démontée et ses moyens de télémesure répartis sur 2 autres stations mieux situées le long de la cote brésilienne. Le plan de développement et de qualification d'Ariane s'étalera sur 7 ans et demi. Les 3 premières années seront consacrées à la qualification des éléments des étages, moteurs structures, équipements et au début des essais d'ensemble propulsifs (janvier 1976), de maquette dynamique (février 1978) et électriques (juillet 1978) du lanceur. Le SIL, construit par l'Aérospatiale sur le site des Mureaux, près de Paris sera mis en service en octobre 1975. Pour les essais moteurs, le site de Vernon investira 200 millions FF pour la construction de bancs de tir, le PF20 (point fixe) pour l'étage L140 complet, le PF41 pour les essais turbopompe et de moteur HM7, le PF42 pour les essais "battleship" et le PF43 pour les essais étages de vol. En attendant, les essais cryogéniques se dérouleront à Villaroche au centre de la SEP. En Allemagne, les bancs du DFVLR à Lampoldhausen vont être modifiés pour les essais du moteur du L33, en condition d'altitude simulée. 1977 verra la qualification des étages et la recette du site de lancement au CSG. Il est prévu 4 vols d'essais, dont 2 de mise au point, en mars et novembre 1979. En 1978, les ministres des 10 pays participants devront statués sur la mise en production en série du lanceur. Les études du CNES tablent sur un marché de 235 à 50 satellites GEO civils de 400 à 750 kg sur les 10 ans à venir pour les besoins de l'Europe (télécommunication, TV, météo, contrôle du trafic aérien et maritimes) et les besoins de pays tiers en télécommunication et TV éducative.
Usinage d'une calotte hémisphérique du fond de réservoir L140 sur la tour verticale Berthiez aux Mureaux et maquette d'un des réservoir du L140
Modèle de turbopompes et de moteur HM 7 pour l'étage cryogénique H8 d'Ariane. Modèle de la baie de propulsion du L140, Drakkar, avec ses 4 moteurs Viking 2 1 avril, dissolution et incorporation à l'Agence spatiale européenne du CECLES/ELDO.
Mai, suite au décès du président de la République Française Geroges Pompidou en avril, le nouveau locataire de l'Elysée, Valery Giscard d'Estaing donne un coup de frein au programme Ariane. Le président demande de suspendre la notification éminente des contrats passés par le CNES à l'ESA. Il est convaincu que le budget de 2 060 millions de F, plus la marge de 20% sera dépassé. C'est le président Georges Pompidou, conseillé par Bernard Essambert et soutenu par le ministre de la défense Michel Debré, que revient l'initiative de proposer aux partenaires européens, début 1973 le développement du lanceur L3S "Ariane". Il donne instruction au gouvernement, contre l'avis de son ministre des Finances, un certain Valéry Giscard d'Estaing de négocier et approuver lors de la conférence de juillet 1973 à Bruxelles l'engagement du programme Ariane. Sur le papier, tout est clair, le financement du développement jusqu'au premier vol et la qualification, le tout signé par les 10 états européens participants dans le cadre d'un programme à la carte de l'ESA. Le programme est alors irrémédiablement lancé dans l'industrie européenne sous la maitrise d'oeuvre du CNES, agissant au nom et pour le compte de l'ESA. Les appels d'offre ont été passés depuis, le choix des industriels fait et les contrats de développement ont été négociés dans les 8 mois qui ont suivis. Le président VGE pensait que le cout du programme allait s'envoler, la France supportant plus de 60% du cout, puis 100% si les dépenses dépassaient 133% du budget initial. Cette concession de budget était nécessaire pour que le voisin Allemand accepte d'y participer. Juin, les contrats pluriannuels de développement d'Ariane sont suspendus. Il demande à revoir certains des grands projets "Gaulien" dans le cadre de la préparation du budget 1975. Le projet Ariane avec quelques autres lui paraissent trop "grand". Pendant 4 mois, le programme est suspendu. Le CNES se voit interdire de passer des contrats avec les industriels en vertu d' un accord passé avec l' ESRO-ESA. Michel d' Ornano, ministre de l' industrie, supprime tous les crédits pour Ariane. Un Lobi intellectuel et industriel se crée pour faire changer d'avis le nouveau président. Après 6 mois de négociation de la part des responsables du CNES, dont Frédéric D'Allest, directeur du projet Ariane, le dossier convint le président et ses inspecteurs de part la prudence des choix technologiques validés au préalable par des études et essais expérimentaux. Ce qui incita le président VGE a changer son fusil d'épaule est peut être aussi l'engagement international fait par la France était difficilement dénonciable. La France s'était "mouillée" pour faire accepter son dossier, il ne fallait pas qu'elle recule maintenant que la machine était en route. Août, les équipes de l' ESRO et de Mc Donnel Douglas réalisent une étude sur l' implantation d' un pad de tir pour les lanceurs Delta (2314, 2914 et 3914) sur le CSG. Une décision finale sera prise en octobre. Dans le cas d' une construction, un premier tir de delta depuis Kourou sera réalisé dès juin 1977 avec des satellites européen OTS, Marots et Aerosat. 16 octobre, "la France continue Ariane"
annonce le ministre de l'industrie, Michel D'Ornano. La France est donc à 100%
dans le développement du lanceur européen: Tous les moyens seront mis à
disposition de l'Europe, les moyens de poursuite du CNES, les installations du
centre de Toulouse, le CST et et le CSG à Kourou. Le programme Ariane approuvé
par les parlementaires en 1973 est donc confirmé par le gouvernement de Valery
Giscard d'Estaing après un "réexamen complet de la politique spatiale
française".
Intégration et mise en container du L33 pour les essais dynamiques au SIL aux Mureaux Novembre, de disposant pas assez d'UDMH pour Ariane, la France, qui se servait auparavant pour Diamant chez les américains viennent de conclure un accord avec l'URSS pour la fourniture du précieux carburant. Les américains ont du décliner la demande de la France, leur seule usine est en défaut d'approvisionnement. ce sont donc 1500 tonnes d'UDMH qui seront livrés en France par l'intermédiaire de la société d'importation de produits chimiques soviétique Sogo, pour faire tous les essais d'Ariane. Concernant les autres ergols, Air Liquide en France et Cryotec en Allemagne fournira l'hydrogène liquide, Ai Liquide fournira également l'oxygène liquide et Pierrefitte et Aubry, en France fourniront le N2O4.
1975 Le CNES va mettre en sommeil le CSG dès le 1er juillet après le lancement des 3 Diamant BP4. 200 emplois vont être supprimés. Cet arrêt d'activité va être mis à profit pour moderniser et rénover le centre. Le parc d'ordinateurs va être entièrement changé. La construction de l'ensemble de lancement Ariane va permettre d'employer une centaine de personnes. Les travaux de génie civil vont démarrer cet été. En octobre 1977, les équipes commenceront la réactivation du centre , menant la recette des installations en février 1978.
425 personnes travaillent à la SEP directement sur Ariane qui recevra 820 millions de F pour l' ensemble des essais moteur. Le moteur Viking 2 du 1er étage a subit ses premiers essais en configuration turbopompe seule en 1973. la qualification du moteur est prévu en avril 1976. Le premier essai d' ensemble propulsif avec des réservoirs de vol (c' est-à dire d' un premier étage sans ses systèmes électriques) est programmé en décembre 1976 et après 4 essais de ce type, le premier essai de qualification en décembre 1977. La livraison de l' étage de vol doit intervenir le 30 avril 1978 ainsi que celle des étages 2 et 3, de la case et de la coiffe. Le second étage doit subir ses premier essais d' ensemble propulsif en octobre 1976 et après 4 essais de ce type, son premier essai de qualification en octobre 1977. Les essais Viking nécessiteront 52 moteurs. En ce qui concerne le moteur HM7 (héritier des HM4) les essais débuteront en dès avril sur les bancs de Villaroche avant de se poursuivre à Vernon en 1976. Les essais avec réservoirs lourds de banc devraient s'étendre de l' été 1976 à la fin 1977 et les essais d'ensemble propulsif d'octobre 1976 à novembre 1977 suivis par les essais de qualification sur une période de 7 mois. La qualification des sous-systèmes moteurs, structures doit occuper l'année 1976. Le développement du HM7 utilisera 14 moteurs dont trois en configuration de vol. et 6 pour la qualification finale. 15 avril, Bruxelles, 6e et dernière réunion
de la CSE avec les ministres des 10 états européens membres de l'ESRO. Cette
réunion officialise la création de la nouvelle Europe spatiale, dont Roy Gibson,
actuel directeur de l'ESRO, devrait assurer la présidence. L'ESA (European Space
Agency) ou l'ASE, agence spatiale européen succédera à l'actuel CERS-ESRO. Il
restera à nommer le directoire et finaliser la participation des états membres
aux frais du CSG, d'où seront lancer les Ariane. En effet, avec l'abandon des
lancements nationaux, la France n'a aucune raison d'assumer seule les frais d'un
centre qui sera utiliser par les membres de l'ESA. Le CNES assurera 75% des
frais, le reste sera à la charge des 9 autres membres. 30 mai, signature des textes de la convention de l' ESA, l'European Space Agency, l'agence spatiale européenne à Paris lors de la conférence des ministres plénipotentiaires. Prévue en décembre 1973, elle est ajournée en raison de désaccords entre la France et l'Allemagne sur les personnalités à nommer à la tête de l'Agence, et également en raison de la pause française de 1974. Les activités, les biens, les personnels de l'ESRO et de l' ELDO sont transférés à l'ESA.
Au centre le ministre Michel d'Ornano pour la France, avec à gauche Paul Fisher, ambassadeur des Pays Bas, Miguel Maria de Lojendio e Irure, ambassadeur d'Espagne et Hugh McCann, ambassadeur d'Irlande. Debout le secrétaire de la conférence spatiale Michel Bourely. Juin, au salon du Bourget à Paris, l'ONERA présente les maquettes qu'elle utilise dans son centre de Modane pour tester les phénomènes aérothermiques et acoustiques d'Ariane au 1/20. La SEP expose de son coté un moteur Viking 4 qui équipera l'étage L33 d'Ariane. Juillet, Kourou le CNES démarre les travaux de génie civil de l'ancien pad de tir Europa pour Ariane. Les travaux doivent durer 2 ans et faire économiser 100 millions FF au CNES (coût total à 75% couvert par la France, le reste par les états de l'ESA). La fin des travaux de construction est prévue le 31 décembre 1976 et les essais de mise au point des installations doivent s'achever durant le premier trimestre de 1978 avec des exercices de mise on oeuvre d'un lanceur complet jusqu'à une répétition de chronologie de lancement. Le lanceur ne doit pas voler mais à pour objet de représenter suffisamment la configuration du lanceur réel pour que toute les opérations de mise on oeuvre, mise en place des étages les un sur les autres, remplissage en ergols, pressurisation, commandes et compte rendues des organes électriques se fassent comme sur le premier modèle de vol. Celui ci doit arriver le 1er janvier 1979 en Guyane et décoller le 15 mars 1979. 29 octobre, Aerospatiale présente le SIL alors que à l'Ouest de Paris, la SEP, sur son site de Vernon tire au banc un moteur Viking 2. Le Site d' Intégration Lanceur aux Mureaux a coûté 29 millions de F sans compter le banc de contrôle fournit par ETCA Belgique. Le SIL, propriété de l' ESA permettra d' intégrer jusqu' à 5 lanceurs par an. Il a été construit volontairement au fond d' une ancienne carrière en craie pour limiter aux 20 m autorisés par la présence de l' aérodrome voisin la hauteur apparente de l' édifice. Le SIL n'est pas encore occupé par le lanceur Ariane. Seul quelques éléments ont été apportés par les sous traitants pour voir si tout va bien ensemble. La SEP a livré une maquette de la baie du premier étage. D'ici 2 ans, la maquette dynamique prendra forme dans le bâtiment. L'essai du moteur Viking 2 du 29 octobre a duré 80 secondes Mesurant 100 m de long, il possède plusieurs postes d' assemblage des réservoirs et bati-moteur du premier étage, ainsi que deux cellules d' intégration pour ce premier étage L140 et une cellule pour l' intégration du composite supérieur, second, troisième étage, case et coiffe. Un seul lanceur est intégré à la fois sur deux mois. A partir du lanceur L05, l' intégration du lanceur complet ne se fera plus au SIL mais en Guyane, Aerospatiale intégrant toujours les premiers et troisième étage aux Mureaux, ERNO le second dans ses usines allemandes.
380 personnes travaillent aux Mureaux chez la SNIAS pour Ariane. Poste de soudage TIG automatique des viroles entre elles et avec les fonds pour former le réservoir du L140. Le réservoir est ensuite redressé afin de démonter l'outillage de soudage. L'Aérospatiale vient de terminer la fabrication de 3 réservoir prototypes du L140. La firme SABCA fabrique les carénages et les empennages et CASA les jupes inter-réservoirs et la jupe avant. Le SIL va permettre en 1976 les premiers essais au niveau lanceur complet,
les essais de la maquette dynamique. Ces essais sont destinés à vérifier les caractéristiques
dynamiques d'Ariane (modes et fréquences de vibration, amortissements) qu'il
est indispensable de connaître pour assurer le pilotage de l'engin ou éviter
les phénomènes POGO. Les accéléromètres et gyromètres qui permettent le
pilotage détectent on effet ces modes de vibration de l' ensemble du lanceur
qui se traduisent par les mouvements réels du centre de gravité ou de
rotation. Si les organes de pilotage ne comportaient pas des filtres destinés
à éliminer les fréquences correspondantes, les mouvemente de correction
commandés aux moteurs pourraient amplifier le phénomène et aller jusqu'à la
destruction du lanceur. Le phénomène POGO est un couplage entre les modes de
vibration structuraux (principalement verticaux) et les modes hydroélastiques
liés aux compressibilité des liquides et élasticité des tuyauteries, coulage
qui se répercute en oscillations de poussée de moteurs, lesquelles excitent à
nouveau les vibrations structurales et ainsi de suite. Non maitrisé, le phénomène
peut détruire le lanceur ou au moins le satellite (cas du premier lancement
Diamant B, par exemple). Au niveau système lanceur
complet sont aussi préparés des essais de maquette électrique destinés à
démontrer la compatibilité électrique entre les différents éléments du
lanceur et également entre les éléments et le banc de contrôle. Ces essais
doivent aussi valider les programmes informatiques de contrôle utilisés sur ce
banc, ils sont prévus au SIL de mi 1976 à la fin 1977.
La division systèmes balistiques et spatiaux représente 20% du CA de l'Aérospatiale en 1974. 2 établissements de cette division sont dans le Sud, en Aquitaine (1900 personnes pour les étages de missiles MSBS et SSBS) et à cannes (850 personnes pour la fabrication de satellites). Aux Mureaux, ce sont 3000 personnes qui travaillent sur Ariane.
Représentation de la maquette L3S au 1/40e testée en soufflerie au NRL à Amsterdam
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LES CARACTERISTIQUES D' ARIANE 1 |
NAISSANCE D' ARIANE, TEST GRANDEUR NATURE |
NAISSANCE D' ARIANE, ESSAIS DES ENSEMBLES PROPULSIFS |
NAISSANCE D' ARIANE, LA MAQUETTE D'ERGOLS, ARIANE MR |
ARIANE 1, LES PREMIERS VOLS |